27 août 1987, manoir malfoy.

Les jours passent. Les semaines s'effritent. Chaque heure pareille à la précédente. Le tic tac constant de la vielle horloge comme seul compagnon. Elle perd la tête Bellatrix. Le temps devenu une entité incertaine. Un ennemi mortel. Les quelques visiteurs de passage dans sa chambre lugubre ne parviennent pas à lui changer les idées. Narcissa elle-même ne lui tient plus autant compagnie. Peut-être lassée par ses sauts d'humeur. Fatiguée de la voir se lamenter. Elle n'est plus rien Bellatrix. Ombre parmi les ombres. Pitoyable morceau de viande. L'esprit qui s'ébrèche, se volatise peu à peu. Elle ressasse les mêmes sombres pensées. Les mêmes mots tournent en boucle dans sa bouche. Elle encaisse inlassablement les paroles de haine prononcées. Comme si tout était arrivé hier. Comme si il allait franchir le pas de la porte, s'excuser. Tout effacer. La faire revenir.

Pas un mot. Pas la moindre petite lettre. Quelques nouvelles ici et là. Il est en vie, poursuit ses affaires. Plus proche que jamais du Seigneur des Ténèbres. Ca ne fait que l'enrager d'avantage. Lui rappeler sa condition. Lui rappeler qu'elle n'est plus rien. Une seule nuit a suffit pour la détruire. Elle, la grande Bellatrix Lestrange. Aujourd'hui réduite à une poupée de chiffon. Petite chose fragile. Gamine sans défenses. Elle essaie de se persuader qu'elle fait ça pour Narcissa. Sa cadette qui a besoin d'elle. Le petit Draco privé de père. Elles sont plus fortes ensemble les sœurs Black. Elles l'ont toujours été. Elles ne pouvaient pas affronter cette nouvelle vie sans le soutient de l'autre. Personne en dehors de ce manoir n'a besoin de savoir la vérité. Terrible blessure qui zèbre son âme, déchire son cœur.

Aujourd'hui pourtant, quelque chose est différent. Bellatrix a quitté les ténèbres pour rejoindre le petit salon. La lumière naturelle l'éblouit un instant tandis qu'elle s'installe dans un imposant fauteuil. Un claquement de doigt suffit à faire apparaître son esclave. « Sers moi un verre. Vite. » Dobby s'exécute sans un mot, le dos courbé, craignant sans doute un coup impromptu de la nouvelle maîtresse des lieux. La sonnerie retentit et l'elfe de maison n'attends pas ses ordres. Il s'empresse de disparaître pour revenir quelques minutes plus tard accompagné d'une petite sorcière aux traits impeccables. « Sybille Trelawney pour vous maîtresse. » s'étrangle l'elfe tandis que Bellatrix le chasse d'un revers de main.

C'est enroulé dans une couverture de soie noire qu'elle accueille son hôte. Un sourire maladroit aux lèvres. Les yeux dénués de toutes étincelles. Pas vraiment vivante. « Sybille, ma chère ! Je suis si contente de te voir. » Salutation sincère. Sybille rayonne, apporte une chaleur bienveillante à la pièce. Contraste frappant avec la personne de Bellatrix. Lugubre, à la limite du morbide. L'étreinte échangée est fugace, comme si se montrer trop avenante se paierait cher. « Whisky ? Ou du thé peut-être ? »

27 août 1987, manoir malfoy.

Les trémules de ton cœur qui ne cessent de te tourmenter. Les ombres qui dansent lascives devant tes paupières closes. Les hurlements des victimes qui s’implantent dans ton crâne. Venge-les Sybille. Venge-nous ma douce. Deviens vaillante. N’oublie pas ta mission. N’oublie pas la raison rubéfiante. Ils causent ton malheur. Ils l’ont toujours causé. N’oublie pas qui tu es. Reste dans la lumière. Vis Sybille. Vis pour nous. Bats-toi pour nous. Vis pour tout nous raconter. Un jour. Sur le pont des âmes. On se retrouvera. On t’aime Sybille. Ne t’écarte pas du chemin. Les yeux qui s’ouvrent, alors que la voix de ta mère reste comme un écho dans ton âme déchirée en deux. Tes lippes qui ne cessent de trémuler. Les perles d’argent qui se font violence sur tes joues de craie. Tu n’es plus celle que tu étais. Tu te perds, hurlant dans la thébaïde, sans personne pour t’entendre, la mer bonace comme seul témoin de tes malheurs. Tu ne sais plus de quel côté te ranger, tu n’entends que la mort, tu ne vois que les combats d’espoir oiseux. Tu ne vois que les cercueils qui s’accumulent. Tu n’entends plus que les pleurs incoercibles de ces parents qui ont perdu leur enfant, mort à cause de l’espoir, mort pour une cause perdue d’avance. Tout n’est qu’hypotypose et tu es la seule, Cassandre, à te rendre compte de la finalité macabre. Tu devrais t’en vouloir, t’en vouloir de ne pas sacrifier ta vie, comme eux. Tu finiras seule Sybille, duègne qui apprendra la lâcheté aux générations futures. Les émerillons qui se décrochent de tes paumes, les stigmates qui saignent alors que l’on vient te chercher, dans un bruit sourd. Bellatrix. Douceur éristique d’une amie qui n’aurait jamais dû l’être. Surprise exquise de ce lien. Bellatrix et son nom qui la dépasse, et sa cruauté sans pareille. Tout le contraire de toi et pourtant. Tu n’as vu que la lumière dans son regard, tu as entendu son rire parmi la foule. Bellatrix, une des seules personnes qui te pousse à choisir l’autre camp avec plaisir, parce qu’elle t’a vu, comme tu l’as vu, alors que vous étiez dépassé par un nom, une réputation. Elle a percé ton cœur, elle t’a apprécié toi, pas ton don, mais ta gaieté, mais ta lumière qui lui manque. Le monde devient billebarré alors que tu transplanes pour atterrir dans son manoir. Les murs imprégnés des cris des damnés. Tu essaies de ne pas entendre, de ne pas comprendre que tu atterris dans la gueule du loup. Tu essaies d’oublier que si Bellatrix voit réellement dans ton cœur, elle ne te fera pas de cadeau. Ton sourire est sincère quand tu la prends dans tes bras. Tu essaies de ne pas en parler, parler de ce ventre gravide, parler de ce qu’elle a perdu. Tu l’as vu, tu as vu sa peine dissimulée, tu as vu ce soulagement, tu as vu qu’elle ne serait jamais mère. « Whisky ça serait parfait ! » Tu restes près d’elle, essayant de ne pas revenir sur votre dernière rencontre. « Je suis contente de te voir, tellement de choses se sont passées depuis notre dernière rencontre ! » Tu joues ton rôle malgré tout, essayant de garder à l’esprit qu’elle faisait peut-être parti du complot contre tes parents, qu’elle a sûrement ris en entendant leurs hurlements de désespoir. « J'ai été aux obsèques de ce cher Dumbledore» Tu souris à Dobby quand il t’apporte ton whisky, buvant une grande gorgée avant de reprendre. « Ils étaient tous là à le pleurer comme si c’était un Dieu. » Un grand homme, un homme que tu appréciais énormément, qui ne comprendrait pas pourquoi est-ce que tu fais tout ça.

27 août 1987, manoir malfoy.

Sybille qui illumine la pièce. Aura peut-être trop pure. Beauté incandescente. Elles se font face. Deux femmes d'un autre temps. Déesses qui s'ignorent. Deux forces de la nature. Chacune à son niveau. Chacune à sa façon. Réunies sur cette terre pour accomplir un quelconque funeste dessein. Elle sait peut-être Sybille. Difficile à dire. Bellatrix n'a pas le don. Elle ne lit pas dans le regard de cette étrange amie. Réconfort qui lui perce le cœur. Ses secrets fondent comme neige au soleil. Toutes ses pensées si bien dissimulées, enfouies sous un tas de terre cent fois retournée. Elle sait Sybille. Et cette simple pensée est à la fois grisante et déroutante. Dangereuse. Il n'y a pourtant rien qu'elle craint Bellatrix. Maîtresse absolue. Un claquement de doigts et la petite Sybille disparaîtra.

« Je veux tout savoir ! » Depuis trop longtemps coupée de ses sources. Elle ne sait que l'essentiel. Ce qu'elle doit savoir. Les informations de premières mains. Celles qui viennent du Lord. Elle sa plus loyale suivante. Elle qui a toujours été là. Et le sera toujours. On l'a finalement écartée. Mise à l'écart brutalement. Et elle est autant à blâmer qu'eux. Tous ces êtres abjectes qui se sont rués aux pieds du Seigneur des Ténèbres. Tous prêts à prendre sa place. Mais elle ne les laissera pas faire. Bellatrix n'a pas déserté cette terre. Elle compte bien reprendre sa place. Son trône. Mettre à feu et à sang ses ennemis.

L'elfe est congédié sans ménagement et Bellatrix se laisse tomber dans un fauteuil moelleux du petit salon. La flamme dans son regard ravivé par la mention du grand Albus Dumbledore désormais rendu à la terre. Ramassis de poussière bouffé par les vers. « Quel spectacle délicieux. » Elle essaie de s'imaginer les larmes, l'étincelle d'espoir qui s'éteint chez ses fidèles. Etincelle rapidement transformé en feu dévorant. Elle les hait tous. Eux qui ont brisé son foyer. Eux qui ont réussi à la mettre au sol. « Ils vont prendre l'habitude de pleurer et hurler. Crois moi. » Promesse faite dans les ténèbres. Elle n'aura de repos que lorsque vengeance sera accomplie.

Confiance aveugle. Moment privilégié. Elle est vraie avec Sybille. Presque sincère. Quelque chose chez la sorcière qui donne envie d'y croire. Elle s'offre toute entière à Sybille. Sans concessions. Sans arrières pensées. Drôle d'amitié forgée. Décidée par des forces surnaturels. Elle sirote son whisky pur feu, les yeux momentanément perdu sur un point fixe derrière la jeune sorcière. Et les mots lui échappent finalement. « Est-ce que tu l'a vu ? » Lui. Rodolphus. Le nom qui refuse de franchir la barrière de ses lèvres. Murmure qu'elle retient de toutes ses forces. Pauvre petite Bellatrix. Pantin entre les mains de ce sentiment futile. L'amour qui signera son arrêt de mort.

27 août 1987, manoir malfoy.

Les âmes qui s'unissent, et pourtant, ô pourtant qui divergent, à jamais séparées par un abysse trop grand, par des mains cadavériques qui ne cessent de vous attraper, quand vous essayez de vous rejoindre. Bellatrix et sa loyauté, Bellatrix et sa froideur, et sa haine de l'autre, d'elle même, surtout d'elle même. Anéantie par une loyauté que trop peu rendue. Et toi Sybille, brisant chaque lame dans les omoplates de ces personnes que tu as aimé, que tu aimes toujours, de ces amis que tu avais promis d'aider, à jamais. Tu les as laissé Sybille, tu leur a tourné le dos sans aucun ressentiment, aveuglée par ta vengeance, enivrée par l'odeur cuivrée du sang de tes ennemis, finalement tout aussi glaciale qu'elle, finalement tout aussi folle, te complaisant des malheurs de ceux que tu exècres. Tout savoir. Ton regard qui se pose sur elle, elle que tu considères comme une amie, une des plus proches, la plus proche en ce moment, celle qui te voit telle que tu es, qui te fait confiance, qui ne te voit pas que comme un amusement, que comme une plaie, un boulet dont il faut s'occuper en soupirant. Tout savoir a un certain poids tu sais. C'est difficile de vivre sa vie en sachant déjà que tout ne sera que chaos au bout du chemin o Bella, si seulement tu savais à quel point je souffre, à quel point j'agonise sous les voix qui me hante, à quel point j'aimerais ne plus voir les maisons bruler, les gens mourir, ne plus ressentir tout le poids de la douleur innommable des mères pleurant sur le torse de leurs enfants mort dans cette guerre inutile. Elle, elle te comprend, elle a toujours réussi à lire en toi, à te comprendre, parce que tu arrives à lui parler, comme si tu l'as connaissait depuis toujours, parce qu'elle ne te jugera jamais, pas comme eux, pas comme Agatha et ses mots qui te déchirent encore le coeur à chaque pensée.

Tu te poses, noyée dans ton verre ambré, à quoi joues-tu petite Sybille, tu finiras par te perdre dans les aléas, sans savoir qui tu es, baignant dans les limbes de l'oubli, à jamais noyée entre les deux limites, ne pouvant plus atteindre la lumière mais pas assez que pour rejoindre la noirceur, sans aucune identité, sans rien auquel t'accrocher. Bella ne restera pas, elle te tuerait, sa baguette te caressait délicieusement la nuque si elle savait tes plans, si elle savait que tu n'es là que pour le tuer, lui, Theseus. Pleurer, hurler, elle, la cause de toutes ces douleurs, elle qui a surement tué un de tes amis, elle, un monstre et pourtant ... tu soupires, pensant à eux, tes êtres chers, Rosen et son sourire. "Ils continuent de se battre alors qu'ils ne gagneront jamais, je ne comprends pas un tel acte d'idiotie. Tant de vies perdues pour rien. Tu ne pourrais pas t'imaginer sans eux, tu aimerais tellement leur partager tes visions, leurs corps sanguinolents, sans vie, pour une cause perdue d'avance.

Rodolphus. Et l'amour qui finalement vous relie, parce que vous êtes des femmes, des êtres humains avant tout. Tu sais, tu sais tout, tu as entendu les hurlements, tu as entendu les craquements déchirés d'une séparation qui se veut précoce, parce que leurs envies ne sont pas les mêmes, parce que les rires mutins ne viendront jamais combler le manoir Lestrange. Désespérément vide. "Il t'aime Bella, ça ne fait aucun doute." Tu essaies de trouver tes mots, parce que tu l'apprécies, parce que tu ne veux pas lui mentir, pas à elle, pas maintenant. "Tu ne lui donnes pas une chose qu'il désire plus que tout." Un corps qui s'arrondit, une descendance, alors que les familles s'agrandissent, que la pureté vient éclaircir la noirceur de l'élite, alors que les Lestrange s'assombrissent, encore, toujours. "Rien ne va aller en s'améliorant Bella si tu n'y mets pas un peu du tien ..." Tout pour amour, même ça, jusqu'à se sacrifier le corps, jusqu'à passer au delà de ses propres envies, toujours par amour.

27 août 1987, manoir malfoy.

Les blessures qui hantent la voyante n'atteignent pas Bellatrix. Elle ignore tout des batailles qui se jouent derrière les yeux curieux de son amie. Des yeux qui en ont trop vu. Un cœur qui bat à peine. Comme celui de Bellatrix. Elles partagent le poids du monde sans le savoir. Autant de blessures invisibles, des marquent qui ornent leurs âmes. Des douleurs qui se réveillent avec le jour. Elle essaie d'oublier, d'effacer la vérité à coup de whisky. En vain. Y a rien pour atténuer le mal. Rien pour lui changer les idées. Elles reviennent toujours. Plus fortes. Plus douloureuses. Des souvenirs en boucle dans sa tête. L'impression qu'il est là. La sensation de ses bras autour d'elle. Sa bouche contre la sienne. Les yeux dans les yeux.

Le rêve s'estompe pour laisser place au cauchemar. Cette réalité dégueulasse. La vie en gris. Si elle savait. Qu'est-ce qu'elle ferait de tout ce savoir Bellatrix ? Est-ce qu'elle serait meilleure ou pire que Sybille ? « Je suppose. » Les pensées qui tournent comme un vieux disque. « Le chaos et moi sommes de vieux amis. » Elle sourit vaguement, la blague faisant son chemin. Elle n'a peur de rien Bellatrix. Elle qui engendre la destruction, se nourrie du chaos. Elle qui rit de la mort, les joues maquillées du sang de ses ennemis. « Je peux encaisser Sybille. » Dis moi. Le regard avide de ces vérités qui font mal. Les mots qui finiront par la détruire. Personne pour voir qu'elle est déjà à terre. Bouffée par les mensonges et les secrets.

La capitulation viens plus vite que prévu. Et Bellatrix n'a finalement pas le temps de se préparer. Elle se redresse, à l'écoute, la couverture qui tombe, dévoile ses épaules osseuses. Son cœur qui se serre, menace d'exploser. Le souffle coupé par la confession. D'où qu'elle vienne, elle sait Bellatrix. Il n'y a que la vérité dans la bouche de Sybille. Cette horrible vérité qui la laisse vide. Complètement perdue. Elle n'a jamais compris l'amour. Encore aujourd'hui. Même maintenant. Ca la dépasse. Mais elle sait qu'ils ne peuvent pas vivre l'un sans l'autre. Elle sait que ça la rend faible d'être loin de lui. Elle sait qu'elle est morte de l'intérieur. Sans lui pour la réchauffer. Sans lui pour murmure à son oreille. Et lui ? Il se passe d'elle. Elle qui a fauté. Elle la cause de tout. Ca la fait doucement rire d'entendre ça. De ces rires triste pleins d'amertumes. La rage qui menace de la prendre. Les dents serrées, la mâchoire contractée, elle pourrait s'arracher les entrailles. Ses doigts s'enfoncent seulement dans la couverture, recouvre son ventre. « Jamais. » qu'elle murmure. Prière en continue.

Son regard accroche celui de Sybille. Prière désespérée. « Y mettre du mien ? » Elle enrage, ses limites finalement atteintes. Elle se défait de sa protection de soie, debout sur ses deux jambes à faire les cent pas dans cette pièce devenue prison. « Quoi, les astres t'ont dit que je devais enfanter pour retrouver ma vie ? C'est ça Sybille ? Je dois me perdre ? » Tout perdre.

27 août 1987, manoir malfoy.

Les lions qui hurlent, alors que vous vous battez, pour vous, pour toi, pour elle, jusqu'à en crever de douleur, parce qu'on ne vous a jamais donner de réelles chances, que vous avez du trafiquer les cartes, parce que vous êtes des ahuries, parce que vous êtes essoufflées, brisées, craquelées à force de coups, à force d'avoir le corps oedématiés. Elle, toi et le manque d'empathie qui vous unie, parce qu'on ne vous a jamais fait de cadeau, parce que le mur qui vous protège a été construit de vos mains. Liées dans l'agonie, liées dans les larmes de haine, liées par un manque d'amour trop fort qui a fortifié votre myocarde, qui bat à peine. Deux âmes, deux femmes brisées, respirant à peine et hurlant de vie, la chaleur vous emplissant, quand même, malgré tout, malgré la guerre qui fait rage, malgré les sacrifices, malgré les absences qui se font lourdes. Je peux encaisser. Ô Bella, si seulement tu savais. Si seulement. Les âmes hurlant. Les moires en frénésie. Les flammes qui mordent. La glace qui brule. Les corps se décomposant. La victoire du mal. Si seulement. Le silence, un salut. Un partage. Egoiste pourtant. Une épaule pour compenser le poids des malheurs. La sapience qui se brise alors que tu commences à parler, alors que tes yeux partent déjà ailleurs. - le monde finira par être horrible. Même pour nous et pourtant je vois notre victoire mais je sens que l'on va se perdre parce que trop de monde périra et qu'on ne pourra plus s'accrocher qu'à nous même.. Les montagnes jamais franchies, un gout de trop peu alors que le pouvoir s'étiolera, alors que les parégoriques ne feront plus effet, la victoire prendra un gout amer, la senescence enlaidira votre reflet dans le miroir. Plus rien n'aura de sens, alors que les maisons bruleront, que les dalles seront mouillées par l'hémoglobine des maupiteux. La palinodie sera morne et vous serez là, âmes errantes.  Les mots qui brisent le coeur, les finalités qui ne seront jamais aboutissement de quelque chose. Les mots barguignants alors que tu le sais, tu sais que tout ne sera que déchirement, que les coeurs ne pourront plus jamais s'entendre, que les bras d'un autre sont là pour les accueillir - Je sens que vous êtes déjà ailleurs ... Que ce manque d'alignement de vos opinions finiront par vous perdre. . Ta main qui prend la sienne. - Est-ce que ça en vaut la peine réellement Bella ? Est-ce que tu es prête à te perdre, à nier tes volontés pour sauver ton couple ? Alors que tu ferais pareil, que tu te ferais invisible pour qu'il te revienne, que les leptologies se font différentes quand on parle de toi, de lui et de ces acréantements qui te hantent, de ses prunelles adamantines qui te hantent à jamais.

27 août 1987, manoir malfoy.

La rage qui va et vient. Le feu à peine allumé qui meurt déjà. Les braises qui cherchent désespérément à crépiter, juste exister. Reste quelques étincelles tenaces qui s'accrochent dans leurs prunelles dilatées. Elles n'ont pas fini de se battre. Vlakyries indestructibles. Reines immortelles. Elles ne sont pas encore à genoux. Pas tout à fait tombées. Encore capable de frapper. Malgré les blessures, les échecs et les pertes. Malgré les fêlures du cœur et de l'âme. Il y a toujours une carte à jouer. Une main à serrer, quelqu'un pour vous relever. Des regards qui s'accrochent et se comprennent. La même lueur, la même détermination. Elle s'y accroche Bellatrix. Comme une enfant à sa mère. Gamine perdue. Les ténèbres désormais trop épaisses. La nuit trop noir. Et personne pour chasser ses démons. Personne pour lui dire que tout ira bien. Personne. C'est le vide. Gouffre béant à ses pieds. Elle contemple les abysses, prête à s'y jeter. Parce qu'il n'y a plus d'espoir. Même Sybille l'avoue. Douce Sybille. Tout aussi maudite qu'elle. Mal née. Elle s'accroche désespérément à cette main qui se tend. Ce bout de chair qui bientôt pourira. Comme tout le reste. « On a déjà trop perdu. » La chute se précise. Même si la victoire est certaine. Même si elle fini courronnée d'étoiles. A l'apogée de leur réussite, elle tombera Bellatrix. Le monde en ruines, les flammes prêtes à lécher ses pieds nus. Il ne restera rien.

Sa poitrine se serre alors que les mots de Sybille caressent ses oreilles. Sa douceur en parfaite contradiction avec la brutalité de cette réalité qu'elle énonce. Cette vérité dégueulasse qui lui vrille les tympans. Ces mots qu'elle ne veut pas entendre mais qui déjà font leur chemin, empoisonnent son esprit. « Est-ce qu'il n'y a vraiment aucun espoir ? » Prête à s'en remettre aux cartes et aux astres. Prête à regarder les étoiles et à y croire. Mais certainement pas prête à renoncer à qui elle est. Sacrifice implacable qui lui tord les boyaux. « Je ne veux pas reculer Sybille. Ce n'est pas dans ma nature. » Elevée pour aller de l'avant. Toujours. Elle les a tous laissé derrière. Ceux qui ont cherché à la rendre faible. Ceux qui ont essayé de la sauver. La sauver de quoi ? Avance Bellatrix. Ils ont abandonné la partie. Ils t'ont laissé. C'est elle qui domine. « Toi tu me comprends, n'est-ce pas ? »

27 août 1987, manoir malfoy.

Et soudain tout ne fut que silence, alors que les mots se disent, percutent les âmes, que les cris cessent, que la guerre s’arrête, un instant. Les souffles sont courts, et tu prends conscience de tout ce que tu as perdu, en voyant sa détresse à elle, Bellatrix et l’être aimé qui s’éloigne sans cesse alors que le myocarde se déchire, que le souffle se coupe, que la terre s’effondre sous ses pieds. Tu te revois des années en arrière, l’alacrité s’estompant de ton corps, son ton chattemite qui te bousille les oreilles, pas assez, pas assez que pour continuer, pas assez que pour t’aimer plus qu’il ne l’aime elle, elle et ses airs méphitiques, elle, faquin sans valeurs, elle que tu as envie de tuer depuis tellement longtemps, te soulageant en imaginant son corps inerte sous tes éclairs smaragdins. Tu connais la douleur. O Bella. Accroche toi. Tu y arriveras. Tu vivras. Tu peux le faire. Sans lui et son égoïsme. L’amour. Foutue fadaise. Foutu espoir d’un sentiment. Heureux, heureux à deux. Impossible. Tu ne seras jamais heureuse. Sybille, Bellatrix. Même combat. Mais toi, Sybille. Toi, tu resteras. A ses côtés. Pour toujours. Elle, ton amie. Alors qu’Agatha est loin. Alors que Rosen est loin. Il ne reste plus qu’elle. Elle et sa cruauté. Elle. Vos plurivoques qui s’entremêlent. Semblables. Tellement plus. Tu aimerais lui apporter la nitescence, lui dire des mensonges qui se transformeront en apaisement mais tu en es incapable parce que tu sais à quel point l’espoir détruit, à quel point les déchirures ne s’apaisent jamais. Tu aimerais lui dire que se retourner est la seule solution. Tu as réussi toi, en tout cas tu essaies, tu essaies vraiment. Tu aimerais lui dire de décaniller, de partir très loin, loin de cette colère, loin de cette guerre qui ne cesse, partir loin, se trouver un espoir, se créer une forteresse ou vous aurez la chance d’oublier, de tout oublier et de vous reconstruire. Vous n’avez plus beaucoup de temps avant que ça ne soit trop tard, avant que vous soyez sur un point de non-retour, avant que vous ne soyez trop noircie que pour remonter à la surface. Tu aimerais lui dire que son amour pour lui est infrangible. « Je suis désolée Bella … » Tu soupires, tu es sincère, tu aurais au moins voulu être spectatrice de son bonheur à elle. « Il restera froid face à tes objurgations. Il ne renoncera pas à ses désirs et si tu ne lui donnes pas ce qu’il veut, il te laissera … » Tu le vois lâcher sa main, s’en aller vers une peau plus douce, vers un chemin plus prolifique, froissant d’autres draps, embrassant une peau chaude, fruitée d’une autre. « Je te soutiendrai peu importe le choix que tu fais. » Tu regardes par terre, n’osant pas affronter son regard. « Je sais ce que ça fait d’aimer quelqu’un et de ne pas lui apporter tout ce qu’il veut, de le voir s’éloigner sans nous regarder, sans une once de regret. » O Rosen, qu’est ce que tu aimerais l’effacer de ta mémoire, oublier toute cette douleur qui te colle à la peau. « tu es la femme la plus courageuse que je connais, tu es capable d’affronter toutes les tempêtes Bella, je n’en doute pas une seule seconde. » Ta main qui serre la sienne, alors que l’amitié se renforce.

27 août 1987, manoir malfoy.

Il ne reste déjà plus rien d’elle. Avalée toute entière par cette détresse qui lui bouffe le myocarde, pourrie ses chairs. La grande guerrière déchue. Rien qu’une ombre parmi les autres. Reine déchue. Humaine de pacotille. L’impression de disparaître sous le poids de cette détresse qu’elle ne veut pas ressentir. Toute cette tristesse, cette mélancolie trop familière. Amante infidèle. Elle ne joue plus Bellatrix. Terriblement sincère lorsque ses yeux rencontre ceux de la voyante. Sybille qui ne recule pas. Sincère jusqu’au bout. Amitié incongrue, presque impossible. Refuge qui réchauffe le cœur. Sybille qui ne l’épargne pas. Elle devrait enragée, tout envoyer valser. Hurler et faire du mal. Mais elle suffoque Bellatrix. Sa colère dirigée vers la seule personne qu’elle a aimée. Si la chose est possible. Toutes ces années à se perdre. Pour lui. Et voilà qu’elle atteint le fond. Seule dans les ténèbres qu’ils ont eux-mêmes fabriqué.  

Les mots sont durs mais justes. Elle le sait bien. Pas de faux semblant. Pas de mensonges. Elle est comme ça Sybille. Les yeux ne mentent pas. “Mais il m’aimera encore. Toujours.” Il a promis. Pour le meilleur et pour le pire. Peu importe. Il n’y a pas de demi-mesure entre eux. Pas de compromis. Ils s’aiment et se détestent en même temps. De toutes leurs forces. Ca lui arrache un sourire. Pensée étrange. “Y a-t-il jamais eu de choix ?” Pas pour elle. Son destin scellé depuis longtemps. Black tu es née. Lestrange tu mourras. Elle l’a accepté. Fierté à peine dissimulée. Elle a embrassé cette vie en tuant la gamine qui s’accrochait encore à ses rêves. Elle est devenue cette femme forte et courageuse. Cette Bellatrix qui ne ressent rien. Cette machine de guerre au cœur de pierre. Et pas question de laisser une craquelure abîmer la surface.  

Les mains se trouvent, les doigts se mêlent et se serrent. Amitié à jamais scellé. Renforcée par leurs cœurs qui bat à l’union. Lacérés, sanguinolent. Mais pas encore tout à fait brisés. “Celui qui t’as quitté est un abruti.” Elle retrouve de sa passion. L’envie d’être plus. Besoin de prouver que la Bellatrix décrite par son amie existe bel et bien. “Je pourrais le retrouver pour toi et lui faire payer son erreur.” Pas de demi-mesure. Jamais. “Il regrettera, crois-moi. Tout comme Rodolphus regrettera.” Sa vengeance prête à s’exprimer.