Journée pluvieuse. Un ciel gris, sombre, qui annonce la pluie et les orages. Un été lourd, où l'air semble se défiler à tout instant. Eíreen préférerait largement rester chez elle, mais au fond, peut-être est-elle mieux dehors. Son appartement n'est pas très aéré, et au moins, à l'extérieur, il y a cette petite brise qui lui permets de se raccrocher un peu. Parapluie entre les doigts, au cas où le ciel décide de finalement se déverser sur sa tête, elle marche d'un pas rapide en direction de l'hôpital. Visite à son amie, qu'elle n'avait pas vu depuis un temps déjà - l'inquiétude dans le creux de l'estomac, de le savoir mal en point. Elle avait cru comprendre que sa vie était hors de danger, mais Eíreen savait à quel point les blessures pouvaient mal tourner rapidement. Événements confus, et les pensées de l'irlandaise qui ne cessent de tourner dans sa tête alors qu'elle marche en direction du bâtiment. Ça va lui changer les idées de tout le reste, les événements étranges et tout ce qui continuait de sortir dans les journaux, inquiétudes et menaces, Londres lui paraissait tellement menaçant ces derniers temps. Elle ne savait plus trop quoi penser de tout ça, où se placer, si elle devait rester ici. Mais sa vie y était. L'Irlande était son passé. Mais la maison sonne plutôt bien, en ce moment.

Elle prend la direction du bon étage, le petit bouquet de fleurs entre les doigts. Le petit vase en plastique est froid, mais au moins elle a évité la pluie qui aurait pu ruiner les tulipes et les marguerites. Une simple pensée pour son amie. L'estomac serré, même si elle était habituée aux hôpitaux, c'était toujours autre chose de voir des humains et des animaux malades - mais ça faisait partie de son quotidien. Arrivant finalement à la hauteur de la chambre, elle prend une grande inspiration, essayant de faire le tri dans ses pensées, pour ne pas se mettre à paniquer. Mais alors qu'elle passe le seuil, elle réalise que son amie n'est pas seule - il y a quelqu'un, à côté de son lit. Un jeune homme - cheveux sombres, le regard aussi. Eíreen s'arrête, surprise, et le toise. Elle le connaît. Et pourtant, elle n'a aucune idée de qui il s'agit. « Oh ! Je... je suis désolée. » Un petit rire nerveux qui lui échappe alors qu'elle approche, jetant un coup d'oeil à son amie endormie. « Je ne m'attendais pas à ce qu'il y ait quelqu'un. » Elle secoue la tête, normal qu'elle ait des visiteurs. Mais qui était-ce ? « Ses blessures... » Qu'elle souffle, en observant le visage de son amie. « Tout a guéri tellement vite ! » Elle s'exclame, stupéfaite. Les ecchymoses et les coupures n'étaient pas guéries y'a quelques jours à peine. Presque comme de la magie.

[ @idriss ainsworth ]

Près de deux mois que sa sœur se retrouve clouée dans un lit d'hôpital. Les larmes emplissent les yeux de Driss alors qu'il l'observe ensommeillée, presque paisible dans un coma qu'il n'espère pas éternel. Le corps marqué par les morsures des flammes et le visage balafré. Bien qu'ayant toujours été proche de sa sœur, il regrette aujourd'hui de ne pas lui avoir témoigné plus d'affection, de ne pas lui avoir montré à quel point il l'aimait. A quel point il l'aime toujours. L'hypothèse de pouvoir parler d'elle au passé lui déchire le cœur, alors que le regard ému, sa rage tranche avec la tristesse qu'il ressent. Mélange de sentiments et ressentiments qui bouillonne en lui. De toute évidence, il n'a aucune certitude que sa sœur se sortira de cette longue hibernation estivale. Et à nouveau, face à son impuissance, quelque chose se brise, à gauche, là-bas.

Impuissance.
Il se revoit quelques semaines auparavant, suite à l'attaque du festival, dans une chambre immaculée de Ste Mangouste. Sa blessure sur le flan gauche aurait certainement mis des semaines, voire des mois, à guérir, pour un simple moldu. Sorcier privilégié, seulement quelques jours auront suffi à le remettre sur pieds. Du moins, à faire cicatriser la brûlure. Les deux semaines de rééducation suivantes n'auront pas été de tout repos ; mais aujourd'hui, il se sent en pleine forme. La culpabilité l'assaille. Il pourrait l'aider. Il pourrait sortir sa baguette, l'y frayer un chemin jusqu'aux balafres qui peinent à cicatriser. Il pourrait avancer la guérison, d'un simple Episkey soufflé... D'un coup d’œil, il vérifie qu'il est toujours seul. Il ne peut pas l'abandonner comme ça. Pas alors qu'il pourrait faire pencher la balance de l'autre côté. Celui de la vie.

« Oh ! Je... je suis désolée. » Driss sursaute. Rangeant sa baguette en vitesse, il observe la jeune femme qui approche. Eireen. Il la reconnait immédiatement. Son visage s'assombrit, nostalgie de ces moments passées avec cette douce voisine. Le mauvais endroit, au moment moment. Il semble que cette habitude ne lui ait pas passée. Il constate avec un certain sourire triste que comme prévu, elle ne se souvient pas de lui. Là où lui peut parfaitement se remémorer l'Oubliettes envolé. « Je m'appelle Driss, je suis le frère. Enchanté. » Le constat de la brune le fait soudainement blêmir. Y est-il allé trop fort ? Pourtant, ses talents en médicomagie sont drastiquement limités. Gêné, son cerveau surchauffe pour tenter de trouver une excuse. Il ne voudrait pas avoir à jouer avec la mémoire d'Eireen. Pas encore. « Je... J'ai été surpris, moi aussi ! Mais c'est plutôt une bonne nouvelle, non ? » Demande-t-il maladroitement en se grattant la tête. Souhaitant changer de sujet, il enchaine. « Vous venez voir ma sœur régulièrement ? Je n'ai jamais eu l'occasion de rencontrer ses amis... Peut-être aurais-je dû faire un effort. » Murmure-t-il, le regard dans le vide, oubliant un instant cette mascarade imprévue.
Oui, peut-être aurait-il dû. Peut-être qu'il est trop tard, maintenant.

@Eíreen Kearney