C’est à peine si tu reconnais le reflet que tu aperçois dans la glace. Le visage fade mais toujours parfaitement maquillé. La chevelure parfaitement en place, chaque mèche qui ne déroge pas de l’endroit ou elle devrait être. La robe qui tombe parfaitement contre ton corps frêle. C’est que cette vue, elle est banale après tout ce temps. Une apparence parfaite pour répondre à des attentes qui se font de plus en plus lourdes. C’est qu’une soirée de plus. Un autre repas entourée de ses mêmes visages qui cachent tout autant de secrets que le tien, derrière les rideaux d’une apparence pristine. Tu te souviens encore parfaitement du temps ou tu étais excitée de faire partie de ses soupers, de voir les choses évoluer, d’avoir l’impression d’être une part intégrale de cette royauté malsaine. Une Lestrange après tout, ça venait avec son lot de pouvoir. Mais ça venait aussi avec son lot de responsabilités, de compromis. Des compromis sur ta personne que tu ne t’imaginais pas faire lorsque la gamine rêvait de plus. Forcée au silence par ta propre famille sur des éléments qui font de toi celle que tu es. C’est que tu fais semblant de te plaire de tout ça lorsque tu es entourée. Tu y trouves toujours un peu ta place, dans le moment. Mais c’est l’avant et l’après que tu gères de moins en moins bien. La préparation qui semble longue et inutile. L’après coup qui te rappelle une fois de plus à quel point tu es réellement seule. Certes, tu as Astor. Mais tu as beau porter son nom de famille, tu sais que c’est la seule chose qu’il peut te donner. Aucun amour, peu d’affection même dans les meilleures circonstances. Le reflet dans la glace, il te rappelle comment tu es froide, au fond Poppy. Froide de cette solitude forcée. Froide de cette vie de prétention. Froide de n’avoir jamais réellement trouvé ta place dans ce monde dérangé, pas par faute d’essayer. Tu t’accroches à ce que tu connais, tu t’accroches à la loyauté pour une famille qui ne semble pas en mesure d’en faire de même pour toi, tu t’accroches quand même because what else have you got?

Tu es l’une des dernières arrivées à la fonction et tu arrives miraculeusement à passer plus ou moins inaperçue, si ce n’était pas du regard de tes parents qui te trouvent trop facilement. Tu vois peux lire la désapprobation dans les yeux de ton patriarche alors que tu arrives non-accompagnée, mais tu sais qu’il préfère encore que tu sois là seule que pas là du tout. Tu ne sais pas ou est Astor ce soir, mais si on te le demande, il a eu un empêchement d’ordre familiale. Cette famille à laquelle tu es associée sans réellement en faire partie. C’est que tu demeures bien plus Lestrange que tu ne seras jamais Bullwark, Poppy. Et c’est probablement mieux ainsi. Tu te faufiles au travers des différents visages connus. Black, Malfoy, Rosier, Lestrange, Selwyn, tu réalises rapidement que ce n’est pas tout le monde qui a répondu présent Ton regard trouve rapidement celui de Sapho. Belle Sapho qui se tient près de la grande cheminée, seule. Tu te retournes alors qu’un elfe de maisons se promène avec un plateau sur lequel repose de nombreuses flûtes pleines d’un liquide doré. Tu en attrapes deux avant de te diriger vers la jeune femme. « You’re on your own tonight? » que tu demandes avec un léger sourire sur les lèvres alors que tu lui tends l’une des flûtes. « I’ve been left all alone too. » Peut-être qu’on peut se tenir compagnie alors Sapho, rendre cette soirée moins lourde et moins pénible.

Silence pesant dans le manoir des Selwyn seulement dérangé par les allers et venues de Meeky, l’elfe de maison qui apportait à sa maitresse de quoi se préparer pour la soirée à venir. Aucune discussion entre les propriétaires de lieux, deux pièces séparées pour les accueillir et la soirée qui ne les rapprocherait pas plus. « Are you sure you don’t want to come ? Everyone is gonna ask me where you are… » Avait-elle soufflé dans une dernière tentative de convaincre Anar de l’accompagner à la réception de la soirée. Mais le silence du jeune homme avait été suffisamment évocateur. « Can you help me though ? » Ajoute-t’elle en lui présentant son dos, fermeture de la robe faite de velours vert au niveau de ses reins, quête de contact, tentative de rapprochement. Il n’y a pourtant que la morsure de la fermeture contre sa peau, remontée presque brutalement d’un geste sec de baguette qui lui arrache une grimace douloureuse. Larmes qui montent à ses yeux charbonneux, l’indifférence qui la blesse tant elle est glaçante elle quitte la bibliothèque dans laquelle Anar se réfugie toujours lorsqu’ils sont tous les deux au manoir pour reprendre contenance, pour se parer de son masque et ne pas se ridiculiser devant les autres familles.

L’arrivée est discrète, elle a appris à observer Sapho avant de se lancer dans le grand bain, les familles sont toutes présentes, même les Bullstrode dont les pupilles assassines ne tardent pas à se darder sur leur benjamine, le bras libre de son époux. Elle se force à venir les saluer, supporte leurs remarques avec un sourire, évolue quelques temps entre les couples, présentant ses respects, s’excusant pour Anar de ne pas avoir été présent, elle finissait par avoir l’habitude. Mais les mensonges asséchaient son palais, lui donnaient mal au ventre même alors elle ne tarda pas à s’extirper des groupes pour rejoindre un coin du grand salon, près de l’âtre de la cheminée elle trouva un peu de quiétude avant qu’une silhouette connue ne l’aborde.

« You’re on your own tonight? » Acquiescement léger elle ne répond cependant pas avant que Poppy ne reprenne : « I’ve been left all alone too. » Les lèvres peintes s’étirent dans un léger sourire qui se veut apaisé mais qui reste définitivement glacé par le jeu de dupe auquel elle se pliait : « My dear husband is stuck at work. » Souffle-t’elle finalement, en haussant légèrement ses épaules dénudées. Mensonge, il lui semble même que la Bullwark comprend, au delà des mots travaillés de Sapho, que quelque chose ne va pas. Au fond de son regard clair, il lui semble lire le même désarroi, est-ce cela le mal qui touche les jeunes épouses des grandes familles ? L’indifférence de l’époux, l’absence, la solitude ? Puisqu’elle sait que la réponse ne sera certainement pas une vérité, puisque ça lui est finalement égal, elle ne demande pas où se trouve Astor, c’était suffisamment douloureux de se trouver là sans gâcher la fête à une autre.

Autour d’elles, les autres invités échangent sans sembler se soucier de qui peut les observer, tous ont bien trop l’habitude de se plier à l’exercice, petits rois de leur monde malsain. Mais trop jeune, pourtant habituée mais toujours brimée par les apparences, Sapho s’étouffe dans sa robe trop serrée, l’alliance de la sorcière lui brule presque le doigt, pèse lourd et son coeur est lourd, elle se sent vulnérable à la merci de leur jugement. Dans cet enfer, dans la tempête qui manque de la noyer, elle trouve en Poppy une alliée, une bouée de sauvetage même pour garder la tête hors de l’eau. Alors, elle s’accroche, regard qui s’attache à celui de la Lestrange, elle tente d’omettre le monde autour : « How are you Poppy ? Your dress is wonderful. » Reprend-elle avec l’envie d’oublier les absences qui les suivent l’une comme l’autre, encore plus vivaces que si leurs époux respectifs étaient présents. Le sourire est presque honnête, le compliment innocent et les yeux détaillent un instant les traits de la jeune femme, appréciateur. « Should we toast to this evening ? » Propose-t’elle finalement, tendant sa coupe pour l’entrechoquer à celle de la blonde même s’il n’y avait rien à fêter de bien joyeux ce soir-là à part peut-être leur compagnie.

Tu ne mets pas longtemps à boire ton premier verre de bulles d’un coup, laissant la sensation se faire une place dans le fond de ta gorge, descendant lentement alors que tu t’attardes déjà prendre deux nouveaux verres. Un qui est rapidement pris par la jeune femme qui te fait face, un sourire que tu reconnais trop bien habitant ses lèvres. C’est le sourire du mensonge, celui que tu as de coller sur le visage la majorité du temps lorsque tu es entourée de ce monde ou tu cherches sans cesse à te faire une place, sans toutefois être certaine de t’y plaire. C’est que tu veux te conformer, être la fierté de tes parents, sans pour autant être en mesure de leur offrir tout ce qu’ils veulent. Un héritier. Une demande qui pèse de plus en plus lourdement sur tes épaules alors que tu n’imagines pas le jour ou tu vas enfin pouvoir leur annoncer cette nouvelle tant attendue. Tu tentes toutefois de chasser cette pression de ton esprit, concentre tes pensées sur la jeune femme devant toi. « My dear husband is stuck at work. » Tu lèves légèrement les sourcils, devinant trop facilement que ce n’est pas vrai. Qu’Anar, peu importe ou il est, n’est pas pris au travail. Probablement qu’il n’avait pas envie de se taper une telle soirée, et qui peut le blâmer, vraiment? Certainement pas toi. Mais Sapho elle est là, et elle garde la tête haute. Il y a ta main qui vient se placer sur son épaule, dans un geste qui se veut réconfortant mais qui t’arrache un frisson alors que tes doigts entrent en contact avec la douceur de sa peau. C’est qu’elle te plaît, la jeune femme, depuis un moment déjà. Avant même qu’elle ne perde son Bullstrode pour devenir Selwyn, quelques mois auparavant. Une attirance qui, comme tout le reste, se doit d’être cachée dans le fond de ton subconscient, parce que trop honteux aux yeux de ce monde dans lequel l’attirance, l’amour – le vrai – n’a pas sa place. Tu ne dis rien toutefois, te contente de vider une autre flûte trop rapidement, alors que les effets de l’alcool commencent tranquillement à se faire sentir. Tes joues qui semblent s’enflammer, teintée de rose, l’esprit embué, les mensonges plus difficiles à garder en place.

« How are you Poppy? Your dress is wonderful. » Elle semble presque sincère, la Selwyn alors que ton regard descend machinalement sur ta robe trop serrée, les teintes d’émeraudes mettant toutefois un accent particulièrement plaisant sur tes yeux. Non pas que tu es besoin d’aide pour attirer le regard de quiconque, ta descendance de vélane ayant toujours aidé à faire tourner les yeux dans ta direction. Mais tu te plais, sous le regard de la jeune femme, un sourire joueur qui se place sur tes lèvres. « I should probably say that I’m doing fantastic and that you look amazing too. But you wouldn’t believe me anyway. » Peut-être que c’est l’alcool qui parle, peut-être que c’est l’épuisement de devoir tenir les apparences, tu ne saurais réellement différencier l’un de l’autre dans le moment. « You do look really good though. » que tu rajoutes de cette voix envoûtante alors que ton regard scanne la jeune femme de la tête aux pieds. Partant de sa longue chevelure foncée bien placée, t’arrêtant temporairement sur ses yeux noisettes et ses lèvres invitantes, avant de descendre le long de ses courbes avantagées par la robe choisie pour la soirée. C’est que tu manques de subtilité Poppy. You need to be more careful than that. Mais être prudente, ça n’a jamais été une de tes grandes qualités. « Anar’s an idiot. » que tu murmures, plus pour toi que pour elle, sans savoir si elle t’entend alors qu’un elfe passe près de toi et tu t’empresses de prendre une flûte à nouveau pleine. « Should we toast to this evening? » Tu hoches négativement de la tête, bien que tu approches ta coupe de celle de la jeune femme. « Might as well toast to misery and lies, don’t you think? » Because that’s all this evening really is. Et c’est sans attendre la réaction de Sapho que tu enfiles ton troisième verre en moins d’une dizaine minutes, les bulles faisant de plus en plus leur effets sur toi. Tu ne quittes pas la jeune femme des yeux, alors que tu poses ta flûte désormais vide sur l’une des étagères d’une grande bibliothèque se trouvant à côté de la cheminée. « So tell me Sapho, how do you deal with it all? » Trop de vérités, pas le bon endroit, mais tu t’en fiches. T’es sur une lancée, autant apprendre quelque chose de pertinent et de vrai, pour une fois.

Face à elle, Poppy et son sourire avenant, ses grands yeux clairs, sa stature de reine, elle mentirait Sapho si elle disait que jamais son regard ne s’était attardé sur les courbes de la sorcière. Mais ce n’était pas quelque chose de permis dans leur monde, alors elle se contenta de la complimenter, avec l’innocence fausse qui la caractérise. « I should probably say that I’m doing fantastic and that you look amazing too. But you wouldn’t believe me anyway. » Il y a cette amertume qu’elle devine aisément dans les mots, certainement la boisson venait faciliter les aveux. C’était dangereux cependant, de montrer ses failles. « I guess it’s usual, playing the fool, pretending we are queens and kings. » Les mots sont prononcés dans un souffle, elle a honte d’elle même, de se laisser malmener comme cela par la vie, par le destin : ils sont rois et reines, alors pourquoi la couronne semble-t’elle faite d’épines ? « You do look really good though. » Petit sourire, les mots réchauffent son coeur. « Thank you. » Souffle-t’elle au compliment de la Bullwark, légèrement rougissante tant en raison des mots que du regard qui se pose sur elle. Est ce que les autres convives, dont les regards s’attardaient parfois sur les deux jeunes femmes parviendraient à capter les bribes de leur conversation ? Ces derniers pourraient ils lire entre les lignes de leurs gestes, un peu trop appuyés, de leurs regards, un peu trop enflammés ? Sapho ne voulait même pas l’imaginer, bien trop attachée aux apparences et à l’image qu’elle offrait au monde elle écoutait le palabre de la blonde avec une retenue inquiète. Bien sûr, au fond elle ne pouvait que partager les dires de Poppy, mais au milieu de la foule des sangs-pur, jamais elle ne saurait acquiescer.

« Might as well toast to misery and lies don’t you think? »   Les mots s’alignent avec la pensée, mais le lieu est mal choisi pour faire l’inventaire des vices de leur monde. Elle ne répond pas, Sapho, entrechoque son verre à celui de la blonde, l’observe avec un air presque inquiet terminer sa troisième flûte, l’alcool faisait ses ravages, l’honnêteté était dangereuse en ces lieux. « So tell me Sapho, how do you deal with this all ? » Léger sourire qui se glisse sur ses lèvres, plus réel, moins surjoué, alors qu’elle est facilement percée à jour par Poppy elle vient glisser un bras autour des frêles épaules de la blonde, glissant dans un murmure à son oreille : « Come with me outside, dear. » Le ton est calme, mais teinté d’une réelle douceur, comme pour éviter les affres d’un retour de flamme à la jeune femme. Une fuite vers l’avant, pour les préserver toutes les deux des vipères grouillantes, pour pouvoir parler avec plus de liberté, oublier l’épée de Damoclès au dessus de sa tête. Alors qu’elle se recule légèrement, regard brillant qui se pose sur le visage de la Bullwark elle s’accroche un instant supplémentaire au doux parfum qui avait empli ses narines, l’odeur des cheveux de la blonde comme enivrante, plus encore que le champagne qu’elle buvait avec  précaution. L’attente d’un geste d’acquiescement de la jeune femme et dans un geste des plus naturels, la main de la brune vient s’accrocher aux doigts de la Bullwark pour l’entraîner vers les jardins du manoir. Sur le chemin, sa main libre attrape une bouteille pleine sur un plateau et deux coupes vides et elles ne tardent pas à se glisser à l’extérieur, douceur de la nuit d’été qui vient immédiatement apaiser le feu qui avait gagné les joues fardées de la Selwyn.

Quelques pas de plus, les deux jeunes oubliées se perdent un peu plus loin dans le domaine, loin des éclats de voix de la soirée, végétation qui les cache, qui les protège et elles finissent leur course sur un banc de pierre, à l’abri des regards indiscrets. La main de Sapho finit par libérer celle de Poppy, légers picotements qui se font sentir au bout de ses doigts elle lisse sa robe du dos de la main avant de s’assoir sur le banc, tournée à moitié vers Poppy, les yeux qui ne quittent pas le visage de la jeune femme : « It’ll be better to speak... true » Comptait elle s’ouvrir sans détour concernant ses états d’âmes ? Avouer les maux qui la rongent à la demoiselle ? Sapho ne savait même pas si elle était capable d’une telle honnêteté qui la rendrait bien trop vulnérable. Mais le tête à tête avec l’épouse Bullwark était rassurant, comme si le poids qui pesait sur ses épaules était soudainement moins lourd à porter. Certainement était-ce l’idée d’être comprise ? Ou peut être déjà considérée qui lui était agréable. Un geste de baguette et la bouteille de champagne est ouverte, précieux breuvage dans les coupes elle en tend une nouvelle à Poppy malgré la certitude qu’elle avait bien assez bu pour la soirée : « I probably should’nt offer you another drink but.. damn it, who cares ? » Le champagne passe la barrière de ses lèvres, bulles qui viennent se déverser contre son palais, alcool qui délie un peu la langue : « It feels like hell, when I’m home. » Finit-elle par murmurer, répondant avec un peu de retard à la première interrogation de la belle. « It feels cold, and lonely, I hate being lonely. » Les mots sont secs, il y a la fatigue, et le désespoir, elle voudrait que ça cesse mais se rend bien compte que ce n’est que le début du calvaire. « Does it get easier over time ? » Demande-t'elle finalement, comme une supplique. Les grands yeux tristes qui se relèvent, plongent dans les pupilles céruléennes de la sorcière, s’y accrocher, encore une fois, pour ne pas sombrer.  

Tu ne quittes pas la jeune Selwyn des yeux alors que l’alcool te rend plus vrai que tu ne devrais l’être dans le moment. Tu joues à un jeu dangereux, à être aussi honnête devant Sapho. Tu prends des risques, beaucoup trop de risques à le faire devant autant de personnes, mais tu n’arrives pas à te concentrer sur ça, toi qui est normalement la première à faire attention à ce que tu dis, à ce que tu fais. C’est que tu peines à comprendre les raisons depuis un moment. Du mal à comprendre pourquoi tu te forces à faire disparaître celle que tu es a profit de.. Au profit de quoi, justement? Qu’est-ce que tu y gagnes vraiment? Du pouvoir? De la reconnaissance? Pas vraiment, non. Du moins, pas autant que tu ne te l’étais imaginée. C’est toujours un combat constant pour recevoir l’approbation de ta famille alors que tu te plies continuellement à leurs demandes et fait tout ce qu’ils attendent de toi. Sauf une chose. Cet héritier qu’ils attendent avec impatience. Héritier que tu ne peux pas, que tu ne veux pas avoir avec Astor, même si ça semble obligé. Tu repousses la pensée, parce que si les mots coulent trop facilement avec l’alcool dans ton système, tu ne peux révéler ce secret qui plane au dessus de ta tête. Ton homosexualité. Et surtout, celle de ton mari. « I guess it’s usual, playing the fool, pretending we are queens and kings. » Elle ne saurait pas si bien dire, la jeune femme. Tu te pinces les lèvres légèrement, retenant des vérités qui ne sont pas bonnes à dire à voix haute. Il y a longtemps que tu sais que t’es pas une reine, Poppy, et que tu en seras jamais une. « Thank you. » qu’elle souffle, la beauté oubliée. Tu te contentes de lui sourire, mais pas de ce sourire mesquin qui te représente si bien pourtant. C’est plus doux, plus sincère. C’est qu’elle te fait de l’effet, la Selwyn et tu ne pourrais dire si c’est l’alcool qui t’empêche de penser clairement ou si c’est ses yeux dans les tiens. Le tout s’entremêle dans un délice malsain, mais qui te fait un bien fou.

« Come with me, dear. » Tu pourrais protester, lui dire que t’as pas envie d’aller nul part, mais t’en as pas la force, pas le courage. Elle a le bras autour de toi, Sapho, et ça te fait frisonner alors que tu sens son souffle dans ton cou. Tu peines à jouer l’indifférence, mais il y a trop de monde ici, pour te laisser guider par cette envie impure qui te prend de force par surprise. Elle est sur ses gardes, la jeune Selwyn, tu le comprends par cette manière qu’elle a de regarder partout avant d’avancer. Ses doigts viennent se glisser contre les tiens et ça t’arrache un autre sourire, ce contact soudain. Tu la suis sans rien dire, échappe un léger rire alors qu’elle attrape une bouteille pleine de champagne et deux coupes vides. You like the way she’s thinking. La fraîcheur de cette soirée d’été se fait ressentir contre tes bras nues et ton visage brûlant des multiples verres enfilés trop rapidement. « It’ll be better to speak.. true. » True. Tu n’es même pas certaine que t’es capable de savoir comment faire. Être honnête, c’est pas dans les valeurs inculquées chez les Lestrange après tout. Tout n’est que sujet à mascarade. Tu te laisses tomber sur le banc aux côtés de la jeune femme, échappant un long soupir suivi d’un petit rire. « Are you afraid to be true in front of them? » que tu demandes en faisant pointant largement vers le manoir ou se trouve plusieurs membres des différentes grandes familles de sang-pur. Famille, alliés, amis qu’ils disent, mais qu’en est-il véritablement? « I don’t think anyone really cares about us. » Triste réalité. They don’t care enough to love us, just enough to control us.

« I probably shouldn’t offer you another drink but.. damn it, who cares? » Elle comme toi savez que la réponse à cette question est : personne. Tout le monde s’en fout et pour une fois, peut-être que c’est mieux ainsi. Pour ce rare moment de paix et de vérité que tu sembles partager avec cette jeune femme qui te comprend plus que tu n’oses te l’imaginer. Elle te tend une coupe que tu attrapes sans hésitation, laissant une longue gorgée de bulles faire son chemin jusqu’à dans le fond de ton ventre qui se tord déjà pour des raisons que tu refuses d’admettre. Tu ne vas pas trop vite cette fois, replaçant la coupe toujours à moitié pleine à côté de toi. « It feels like hell when I’m home. » Tu te retournes vers elle, tu peux lire trop facilement cette douleur que tu partages avec elle dans le fond de ses iris. Ça te fait presque peur, cette honnêteté brusque, mais tes yeux ne quittent pas les siens. « It feels cold and lonely, I hate being lonely. » Il y a ta main qui vient trouver la sienne. Ta façon à toi de lui dire que tu comprends, que tu compatis, que ce soir, elle n’est pas toute seule. « Does it get easier over time? » T’aimerais tant pouvoir lui dire que oui, mentir comme tu le fais normalement si aisément, mais tu ne peux pas. « Do you think I’d be here getting drunk if it did? » Tes doigts se resserrent contre ceux de Sapho alors que tu détournes le regard, tentant de garder le contrôle sur ces émotions nouvelles qui menaçaient de surgir d’un instant à l’autre. « Astor’s never home, but even when he is, it’s like he isn’t. I might as well be married to a ghost. » Non pas que tu cherchais son affection d’une manière ou d’une autre, mais tu comprends parfaitement cette solitude que Sapho mentionne. « I always knew I’d have to get married to someone my parents chose for me but somehow, I didn’t think it would be that bad, you know? » Gamine, tu voulais croire que l’amour grandirait, éventuellement. Tu voulais croire que ce ne serait pas toujours aussi froid, pas comme tes parents. T’étais loin de te douter que ce serait pire encore que la relation entre tes géniteurs. « Pretending to love someone feels like such a waste of time. » Mais il y a tellement longtemps que tu ne t’es pas permise d’ouvrir ton coeur à qui que ce soit que t’es pas certaine que tu serais capable d’aimer correctement de toute façon...

Alors qu'elles s’enfuient vers les jardins, horizons moins austères où elles pourraient parler avec plus de facilité, Sapho ne cesse d’accrocher son regard aux traits de Poppy, elle tourne la tête pour trouver son chemin, mais ses yeux restent comme attirés par la jeune femme et ses courbes mises en valeur dans sa robe. Mais elle ne comprend pas réellement ce qui lui arrive, pense que c'est l'alcool peut être mais elle n'a finalement bu qu’une coupe. Alors, une fois assise sur le banc, elle tente de faire abstraction, elle parle pour compenser, parle un peu trop, avec une liberté qu'elle avait oubliée. « Are you afraid to be true in front of them? » Il y a cette question qui la dérange plus que de raison, qui fait écho a bien trop de choses que Sapho feint depuis des années. On lui a appris à mentir, au quotidien, sur sa vie, son nom, sans naissance, jusqu’à son visage, finalement, qui était-elle une fois le masque tombé ? Elle ne le savant même pas. Était-ce elle, la sorcière inquiète qui cherchait à attirer l'attention de tous ses pairs, à se faire une place et qui en crevait de ne pas y arriver ? Etait-ce elle la sorcière cruelle qui faisait couler le sang pour se sentir vivante ? Etait-ce elle la danseuse avortée qui pratiquait son art seulement derrière des portes magiquement closes ? « I’m afraid to be true even when I’m alone Poppy. » Un aveu qui a finalement bien plus de portée que ce qu’en déduira certainement la blonde, un aveu de faiblesse qui dépasse le seul cadre de leur conversation, un aveu de culpabilité aussi, mais elle sourit doucement, tente d’oublier le malaise, parce qu’elle ne peut se permettre de tomber. « I don’t think anyone really cares about us. » Léger haussement d’épaules, le tissu glisse légèrement : « They don’t, not for me at least. » Car la petite Sapho n’avait jamais été regardée, trop discrète, trop fragile, trop en décalage avec la vie des enfants de sangs-purs. Enfermée durant des années, le temps que le masque se forme et une fois que cela fut fait, elle était déjà oubliée.

Et finalement, les paroles se délient, loin des regards des autres, Sapho se fend d’un peu d’honnêteté. Parle de son malêtre, parle de ces soirées qu’elle passe seule dans un manoir trop grand, trop inhospitalier. Elle évoque le dédain de son époux, de celui qui lui a promis concours et fidélité jusqu’à ce que la mort les sépare, lâche qu'il était de ne pas tenir sa promesse. Elle voudrait que ça aille mieux avec le temps, elle voudrait que l’espoir cesse de gronder dans sa poitrine, elle voudrait parvenir à l’oublier autant qu'il l’oublie… Mais, la réponse de la blonde n’est pas la pour la rassurer et ce même si sa main qui vient se poser sur la sienne, ses doigts qui serrent les siens, réchauffent un coeur qu’elle pensait condamné au silence pour bien trop longtemps encore. « Do you think I’d be here getting drunk if it did ? » Les yeux s’échappent mais Sapho ne détourne pas le regard, yeux sombres qui ne cessent de scruter le visage aux airs tristes de la Lestrange, par Merlin, qu’elle pouvait être belle. « Astor’s never home, but even when he is, it’s like he isn’t. I might as well be married to a ghost. » Et elle comprend qu’elles partagent bien plus le même mal quelle pensait au début. Amère ironie, comment pouvait-on dédaigner une telle personne ? « I always knew I’d have to get married to someone my parents chose for me but somehow, I didn’t think it would be that bad, you know? » Doucement, elle acquiesce, parce qu’elle comprend, parce qu’au fond d’elle, elle a toujours l’espoir qu’Anar reviennent à la raison, qu’il ouvre des yeux nouveaux sur leur mariage, elle n’avait jamais été son ennemie, alors pourquoi la considérait-il comme telle ? « Pretending to love someone feels like such a waste of time. »

« I’d like him to love me, I try, all the time, to please him, to show him I’m worth looking at. » Elle baisse les yeux, habitude perdue de dire à voix haute ce qu’elle pensait, désamour pour ce qui la rongeait de l'intérieur, elle aurait voulu être plus forte. « But… » Elle retient quelques larmes, froideur oubliée, comme si les premiers aveux avaient libéré toutes ses émotions, enfermées depuis trop longtemps. « There’s always someone else. » Toujours, de sa soeur, la trop parfaite Hécate, la plus belle, la plus drôle, la plus lumineuse de tous les Bullstrode, jusqu’à cette fille, qui, elle était certaine, hantait les pensées de son mari. En y pensant, il y a un rire mauvais qui s’échappe de ses lèvres, qui était-elle pour ne même pas réussir à garder son mari près d’elle ? « I think he has a mistress. » Dit-elle en redressant le regard vers Poppy, main toujours serrée dans la sienne et aucune envie de rompre ce contact qui la rassure : « Not sure, but… He loves someone, and it’s clearly not me… I guess a wife can feel those things duh ? » Mais elle ne savait rien de ce que c'était d’être une épouse, c’était trop tôt, et il ne lui donnait aucune occasion d’être autre chose qu’un alibi durant les soirées mondaines, un bijou terne accroché à son bras, qu’il enferme dès qu’il n’y a plus personne pour les regarder. « I’m never enough. » Qu’elle finit par souffler d’un ton presque acerbe alors qu’elle termine d'un trait sa coupe malgré sa prudence habituelle qui la poussait à limiter ses consommations d’alcool pour ne pas perdre le contrôle. « Sorry, I’m a mess. » Ajoute-t'elle presque précipitamment en passant une main sur son visage comme pour faire disparaitre tout ce qui faisait d'elle un être humain sensible : elle n'avait pas le droit, pas le droit de ressentir, par le droit d'être faible, surtout pas en présence de témoin.
 

Il y a des vérités qui sont mieux non-dites. C’est ce que tu t’efforces de dire, de te faire croire depuis si longtemps déjà. Tu pensais que ce serait plus facile, avec le temps. Que tu finirais par te croire. Que ton coeur deviendrait moins lourd malgré les apparences qui deviennent de plus en plus trompeuses avec les années qui filent. T’es normalement tellement douée pour jouer la comédie devant tous, tu pensais que tu finirais par te croire, à te laisser prendre au jeu. Tu ne veux pas décevoir tes parents, tu ne veux pas être la honte de ta famille. Il y a après tout beaucoup en jeu lorsqu’il s’agit d’être une Lestrange, une réalité avec laquelle tu dois composée depuis ton plus jeune âge. Et pourtant. T’as le masque qui s’effrite à coups de mensonges. Le masque qui menace de tomber complètement, surtout en ce moment alors qu’il y a la main de Sapho dans la tienne, et des vérités sur le bout de la langue alors que tu ne trouves pas le courage de lui mentir à elle. Tu ne pourrais expliquer pourquoi elle te fait cet effet-là, la Selwyn. Après tout, elle n’est pas la première fille que tu trouves à ton goût. Pas la première qui se retrouve dans un mariage forcé, les relations arrangés semblant encore être la norme dans les grandes familles de sang-pur. Et pourtant, il y a quelque chose chez elle qui t’accroche, qui t’attire. Peut-être que c’est ce que tu lis dans ses yeux. Cette peine qui est si similaire à la tienne, celle que tu gardes profondément cachée dans le fond de ton être pour ne pas paraître faible. Mais la solitude, elle te bouffe, jour après jour. Et ça, t’as jamais osé l’avouer à qui que ce soit auparavant. Pas Astor, pas Ophélia, personne. Mais Sapho, Sapho elle ouvre t’ouvre une porte et t’es pas capable de la refermer. « I’m afraid to be true even when I’m alone Poppy. » Peut-être que c’est la manière qu’elle a de te regarder, ou la manière qu’elle a de dire ton prénom, mais elle te chamboule, la jeune femme. « The mask can’t stay on forever. You’ll drive yourself crazy. » Tu le sais trop bien après tout, à quel point il est lourd de prétendre, sans cesse. Sans échappatoire. « They don’t, not for me at least. » Et ta main, elle serre la sienne un peu plus fort. I’m here Sapho. I care. I’m not letting go.

Ça commence à tourner autour de toi, légèrement, alors que tu siffles des demi-vérités que tu t’étais promise de toujours garder pour toi. T’aurais aimé pouvoir la rassurer, la jeune Selwyn, mais tu n’avais pas les bons mots. Tu n’avais jamais su faire dans la dentelle après tout. Tout autour de toi était toujours dur, pas de place pour la douceur, pour le beau. Du moins, pas de cette beauté qui était sincère. Qu’un besoin trop important de pouvoir. « I’d like him to love me, I try all the time, to please him, to show him I’m worth looking at. » Et elle est là, la plus grande différence entre Sapho et toi. S’il n’existe qu’un amour platonique – et encore – entre Astor et toi dû à vos préférences personnelles, Sapho elle, cherchait chez son mari quelque chose qu’elle ne trouvait pas de toute évidence. Et ça te dépassait, de savoir qu’Anar ne regardait pas la jeune femme qui lui avait été choisi. Elle était belle, elle était brillante, et elle avait du mordant Sapho, du moins, normalement. « But… there’s always someone else. » Tu écoutes alors qu’elle peine à laisser les mots prendre place entre vous. Tu sais combien c’est difficile de ne plus prétendre quand c’est tout ce que tu sais faire, elle tu te contentes de la regarder avec plus de douceur que tu es normalement en mesure de montrer. Rien de cette situation ne te ressemble, et pourtant, ça te semble atrocement naturel d’être là pour elle. « I think he has a mistress. » Tu hoches légèrement la tête, surprise de cette révélation, sans vraiment l’être. Après tout, c’est le contre-coup des mariages arrangés généralement, bien peu semble être ceux qui y trouvent complètement leur compte. « Not sure, but… He loves someone, and it’s clearly not me. I guess a wife can feel those things duh? » Tu ne l’as pas quitté des yeux une seule seconde au travers de ses révélations, mais tu sembles incapable de dire quoique ce soit. C’est que tu n’as pas les bons mots pour la consoler, Sapho. Rien à faire pour rendre cette situation plus tolérable pour elle. Si tu sais qu’Astor a des amants, tu n’as jamais vu le tout comme une tromperie parce que malgré le mariage, vous savez que vous ne devez rien de plus à l’autre que de garder les apparences devant vos familles. « I’m sorry Sapho. He’s an idiot for not wanting you, that’s all I know. » Il y a un léger sourire qui se place sur tes lèvres, un sourire que tu espères viendra réconforter la belle qui tu le sais, semble être sur le point de laisser les larmes couler le long de ses joues.

T’as le coeur qui s’emballe dans ta poitrine, n’ayant pas l’habitude de te retrouver dans des situations aussi lourdes et chargées d’émotions qui te sont pratiquement inconnues. « I’m never enough. » Elle fini sa coupe d’une gorgée et tu t’approches d’elle légèrement alors que vos mains sont toujours liées l’une à l’autre. « That’s not true. Don’t let one man make you feel like you’re not enough. » C’était peut-être plus facile pour toi puisque tu n’avais jamais accordé grande importance à ta relation avec Astor. Tu ne pouvais t’imaginer être dans une relation à chercher l’attention de quelqu’un qui ne t’accordait aucune importance. Tu ne pouvais que tenter d’imaginer la douleur, l’incompréhension, le besoin de chercher l’attention. Tu étais après tout familière avec ce dernier, toi qui avait grandi dans l’ombre de tes sœurs. « Sorry, I’m a mess. » Si tu te serais normalement moquée d’elle d’être si vulnérable, tu savais que ton coeur n’était pas là ce soir. C’est sans pudeur ni prudence que tu te rapproches d’elle encore avant de lâcher sa main. « Come here. » que tu murmures ensuite, venant passer tes bras autour de la jeune femme, pressant ainsi ton corps contre le sien. Tes mains viennent doucement caresser ses cheveux alors que tu sens la peau fraîche de la jeune femme contre la tienne, te procurant une multitudes de sensations différentes. L’odeur de ses cheveux, la facilité avec laquelle tes doigts se perdent dans la chevelure, la chaleur de son corps, ton esprit enregistre difficilement le tout alors que tes pensées se perdent dans toutes les directions face à cette proximité. « You’re not alone, okay? I’m here for you. » que tu murmures à son oreille, laissant ton souffle se perdre dans son cou. Incapable de te délier de la belle, ton corps et ton coeur en demandant plus, mais ton esprit t’empêchant de franchir la ligne interdite.

Elle n’avait jamais eu de confident Sapho, jamais personne auprès de qui elle pouvait parler de ce qui n’allait pas, de ce qui ne fonctionnait pas, de ce que le monde extérieur ne devait pas voir. Enfance solitaire, adolescence hypocrite, âge adulte sombre, elle avait fini par s’habituer à garder les épaules droites malgré le poids qui y pesait. Mais ce soir-là, dans le parc du manoir, avec cette bouteille de champagne et la compagnie de Poppy, elle finissait par comprendre le manque des dernières années.

« The mask can’t stay on forever. You’ll drive yourself crazy. » If only you knew. Elle baisse légèrement les yeux, elle se savait fraude, depuis toujours. Elle savait que son sang n’était pas ce qu’elle prétendait, elle savait que son nom de naissance était plus sujet à moqueries qu’à grande réputation désormais. Elle savait aussi que personne ne l’excuserait d’avoir menti pendant tant d’années, et que ses parents la jetterai sans vergogne aux lions si elle faisait le moindre faux pas. Elle était coincée. Coincée dans cette vie de mensonge et elle s’y perdait de plus en plus, se noyait de plus en plus, loin de la surface. « Better being crazy than dead. » Qu’elle souffle cependant d’un ton un peu sombre, haussant vaguement les épaules une nouvelle fois avant d’éluder le sujet d’un geste du revers de la main, la question d’Anar qui lui pèse encore plus, le rejet, les regrets, le malêtre à chaque instant. « I’m sorry Sapho. He’s an idiot for not wanting you, that’s all I know. » Elle hausse vaguement les épaules, elle ne sait même pas quoi répondre Sapho. Parce que l’habitude la pousse à s’efforcer de faire au mieux, et ce qui se passe derrière les murs de leur manoir, ce n’est pas le mieux qu’elle puisse faire. Mais il ne la laisse pas approcher, jamais, grogne comme un animal dès qu’elle essaye de le connaitre, de le comprendre. « That’s not true. Don’t let one man make you feel like you’re not enough. » Et elle voudrait la croire, mais ça confiance avait été piétinée de trop nombreuses fois. « It’s not only him… » Depuis toujours, l’ombre de ses frères et soeurs, l’ombre du nom qui lui a été offert, ses parents qui la pensent inutiles, une honte, disent-ils parfois, sa fratrie, qui ne la regarde pas vraiment, cette pièce rapportée un peu trop différente. À Poudlard encore, les comparaisons, elle est bien plus discrète qu’Hécate, Sapho, plus timide, plus renfermée, bien moins charismatique que Perceval, qui est capable de mener des foules même vers une mort certaine. Sapho qui brillait en cours, qui devient préfète, mais ce n'est pas encore assez. Et à l'âge adulte, Sapho qui est jetée dans un mariage à peine majeure, un mariage qui la mène à sa perte, Sapho oubliée, une nouvelle fois. « But yeah, I guess I shouldn’t care that much. » Facile à dire cependant, tous cherchaient à être acceptés, à être aimés, et si Sapho n’avait pas le droit à ce bonheur, elle tenterait de le trouver autre part. Son travail, son engagement auprès du lord, des choses qu’elle pouvait maitriser. Enfin.

Évoquer ses échecs la touchait plus qu'elle ne l'aurait pensé. Comme si, finalement parler de ce qui n'allait pas ne faisait que le rendre réel, et d’autant plus douloureux. Et face à elle, il lui semble que Poppy se rend compte du mal qui la ronge, elle se rend compte qu’elle est au bord des larmes, au bord de la noyade. « Come here. » Il y a les bras de la blonde qui s’étirent et viennent la serrer contre elle, le coeur qui s’apaise alors qu’elle caresse doucement ses cheveux, un peu trop rassurée, un peu trop bien contre elle elle se permet cependant quelques instants de faiblesse, quelques instants où elle ne prêtait pas attention au monde extérieur. Seulement elle, la belle Bullwark et son odeur enivrante, ses gestes doux et ses paroles apaisantes. « You’re not alone okay ? I’m here for you. » Le coeur qui manque un battement, la promesse qui semble si étrange qu’elle n’y croit qu’à moitié. Mais elle veut y croire, elle veut avoir l’espoir que tout n’est pas si noir qu’elle le pense. Que tout n’est pas si froid que derrière les murs du manoir. Visage enfoui dans le cou de la blonde elle ferme les yeux, larmes qui viennent humidifier ses yeux maquillés, à l’abris des regards elle baisse les armes. Respiration qui se fait un peu plus apaisée, elle se redresse légèrement, ses grands yeux sombres accrochent ceux de la blonde : « Poppy… » Le murmure semble presque s’excuser d’exister, elle a le regard qui ne peut se détourner de la belle, qui s’attarde un peu trop sur les traits de son visage, les lèvres pleines de la blonde qui l’appellent et la réalisation de l’erreur qu’elle manque de commettre, se laisser happer par ses émotions qu’elle ne comprend pas. Mais finalement, la raison qui l’emporte, une nouvelle fois, un petit sourire contrit qui se glisse sur son visage, plus une moue qu’un véritable bonheur et elle se détache totalement de la Bullwark : « Thank you… » Souffle-t’elle alors que sa main s’attardent encore un peu sur celle de la sorcière. Avoir l’impression d’être écoutée pour une fois, que ce qu’elle pouvait dire et ressentir était important, avoir l’impression qu’on la regardait pour qui elle était, enfin : c’était aussi effrayant qu’agréable. Et la chaleur qui germait au fond de sa poitrine n’était certainement pas seulement lié au champagne qu’elle avait bu.
 

Tu pourrais te perdre dans ses yeux si tu te le permettais, tu le sais. Ce serait tellement facile d’ailleurs, de ne voir qu’elle et faire fit de ce monde qui vous entoure. Il y a une tristesse si profonde qui habite le fond de ses iris, ça te chamboule sans même que tu ne puisses réellement t’expliquer le pourquoi. C’est que tu n’as jamais été confortable avec les émotions des autres, encore moins lorsqu’il s’agit de tristesse. Toujours occupée à jouer le jeu de celle qui est au dessus de tout et de tout le monde, sans le moindre intérêt pour le commun des mortels. Alors pourquoi est-ce que tu es si vulnérable soudainement? Pourquoi est-ce que la vérité ne semble plus si lourde à avouer? Pourquoi est-ce que t’as envie de la prendre dans tes bras et ne jamais la lâcher, la belle Sapho? Tu te fais croire que c’est la familiarité de la situation, que ce n’est pas elle, que ce n’est pas toi. Tu te forces d’ignorer ton coeur qui bat la chamaille alors que ton regard bleu se perd dans son regard foncé. Que la sensation de sa peau contre la tienne ne te fait pas momentanément perdre la tête. Parce que t’as trop en jeu. Trop à perdre. Un risque que tu n’as jamais osé prendre avant, que tu ne peux te permettre maintenant. Même si c’est tentant. Même si c’est excitant. Même si ça ferait tellement de bien. Elle semble en avoir besoin, toi aussi, même si tu ne le dis pas en tant de mots. Son parfum te fait perdre ton train de pensées. T’es perdue. Mais bordel, qu’est-ce qui se passe? « Better being crazy than dead. » T’aimerais pouvoir dire quelque chose de réconfortant, mais tu sais qu’elle a raison, Sapho, et tu ne peux t’empêcher de ressentir ce pincement au coeur quand tu penses à tout ce que tu dois cacher, ce que tu dois mettre derrière toi pour le bien-être de ta famille, de ces êtres qui prétendent parfois en avoir quelque chose à faire de ta personne et de ce que tu deviens. Pas trop souvent, juste assez pour te rappeler ou tes loyautés se doivent d’aller. Juste assez pour que tu ne partes jamais trop loin dans ta tête, dans tes envies, dans ce que tu te refuses jour après jour. Juste assez pour être la parfaite marionnette, éternellement. « It’s not only him. » Hochement de la tête, regard sympathique, main que tu serres une autre fois plus fort contre la sienne. Pas grand-chose à offrir en soi que ta présence, que ton écoute, que ton temps. C’est pas beaucoup, mais c’est plus que tu n’offres à qui que ce soit normalement. « But yeah, I guess I shouldn’t care that much. » Tu te penches légèrement vers elle, ton sourire s’estompant légèrement, ta voix qu’un murmure, si basse que tu n’es pas certaine qu’elle puisse t’entendre, Sapho. « I see you. », que tu dis quand même. Parce qu’elle est là sous tes yeux, dans toute sa beauté à couper le souffle et t’es incapable de la quitter du regard. Ensorceler.

Quand la chaleur de son corps se cogne contre la tienne, tu ne sais plus ou donner de la tête. C’est la faute de l’alcool, t’as chaud une seconde, froid la prochaine. Tu dois partir, mais t’es incapable de te défaire de cette étreinte qui te fait tellement de bien. La douceur de ses cheveux, son parfum, son souffle dans ton cou, c’est trop. Beaucoup trop. Mais tu ne fais rien pour arrêter l’impensable, tu ne fais rien pour te retirer de cette situation trop dangereuse, pire encore, t’as qu’une envie, c’est d’aller au bout du moment. Quand elle se recule légèrement, que son visage se trouve à seulement quelques centimètres du tien, tu ne comprends pas comment ça se fait que tes lèvres ne sont pas contre les siennes. « Poppy... » Même la manière qu’elle prononce ton nom semble te séduire et tu te mordilles la lèvre alors que tes yeux ne quittent pas les siens une seule seconde. Et puis soudainement, aussi soudainement que le moment s’est placé entre vous, le tout se dissipe d’entre tes doigts alors qu’elle brise tout contact avec ta peau. Elle inflige quelques mètres de distance entre vous, va même jusqu’à détacher sa main de la tienne et tu as froid soudainement. Retour brutal dans une réalité qui fait toujours aussi mal. « Thank you. » qu’elle siffle, la jeune femme et tu laisses un souffle s’échapper de tes lèvres. « Of course. » que tu dis, soudainement plus froide, plus brusque. Comme si toutes les confidences n’avaient jamais été échangées, comme si la proximité n’avait jamais eu lieu. Comme si tu ne mourrais pas d’envie de l’embrasser il y a de ça quelques secondes à peine. Tu te redresses légèrement, replace une mèche rebelle de ta coiffure de la soirée, passe une main sur ton visage redevenue sévère. « You need to learn not to care. Otherwise you’re right : you’ll end up dead. » Virage à 180 degrés. T’es complètement transformée en moins d’une minute. Parce que tu ne peux te permettre d’être vulnérable plus longtemps. Parce que ça suffit d’être si imprudente avec la vie des autres, mais surtout avec la tienne. « I should go back inside. My mother will be wondering where I am. » Ton neutre. Tu évites de croiser le regard de la brune. Évite de t’approcher de la tentation à nouveau. Elle risque de ne rien y comprendre, la pauvre Sapho. You deserve so much better. But trust me, I’m worst. « It was a pleasure seeing you, Sapho. » Tu n’oses aucune forme de courtoisie, tu refuses de sentir sa peau une fois de plus, tu sais trop bien que tu vas faillir si tu oses une fois de plus. Tu te contentes de lui tourner le dos et de faire le chemin inverse jusqu’au manoir. Don’t look back. que tu te dis encore et encore dans ta tête. Ça ne t’empêche pas toutefois de jeter un dernier regard dans la direction de la Selwyn, probablement encore perturbée de cet échange aux deux extrêmes. I am so sorry.