manoir malfoy, wiltshire, angleterre
@narcissa malfoy

Assise face à la cheminée éteinte, Bellatrix attends. Les yeux rivés sur les cendres froides depuis longtemps, il n'y a pas un bruit, pas un murmure pour venir perturber le cours de ses sombres pensées. Elle a depuis longtemps arrêté de hurler, de jeter aux murs quelques objets sans valeurs, de déchirer la tapisserie ici et là. Désespérément seule dans ce manoir qu'elle déteste particulièrement cette nuit, la jeune femme attends le retour de son époux. Et les heures défilent, hors de sa portée, impossibles à arrêter. Où qu'il soit, il ne reviendra pas avant l'aube. Et ça la ronge de l'intérieur, lui tord les entrailles. Son palpitant la fait souffrir, horrible petite chose qu'elle aimerait écraser au creux de sa paume. Elle lâche un profond soupir suivi d'une exclamation exaspérée, à bout de forces et de patience. Dans un son étouffé et un mouvement délicat Bellatrix Lestrange disparaît, abandonnant son fauteuil, la salle à manger vide, le manoir, Londres.

Elle réapparaît promptement devant une imposante bâtisse, un énième manoir aux portes closes. Dans un reniflement, elle presse son doigt contre la sonnette et attends, impatiente. Sa baguette trouve le chemin de sa main, tapotant les barreaux métallique du portail jusqu'à ce qu'une créature fasse son apparition dans un craquement magique. « Maîtresse Lestrange ! Quel honneur... Mais, c'est la nuit... Que... » Balbutiements dégoûtants. Bellatrix colle son visage aux barreaux, menaçante, peu encline à parler à l'elfe de maison. « Ouvre moi imbécile ! Je dois voir ma sœur tout de suite ! » La créature s'incline, tremblotante et obtempère aussi vite que possible, dégageant un passage dans lequel la sorcière s'empresse de passer. D'un pas vif et décidé, presque dansant, elle se dirige vers l'entrée du manoir. « Va dire à ta maîtresse que je suis ici. Vite ! » Woutch la créature disparaît et Bellatrix pénètre à l'intérieur de la demeure silencieuse. Plongé dans les ténèbres, le manoir a l'air désert. Discrète, ses pas la mène jusqu'au salon plongé dans le noir. Elle grimace Bella, renifle l'air. « Allume donc les bougies vermine ! » qu'elle s'exclame. Pas un son. Pas un mouvement. Rien. Elle lâche un énième soupir exaspéré, croise les bras. Lorsqu'enfin l'elfe réapparaît c'est avec une bougie. « Ta lenteur te vaudra des coups. » Grimaçant, l'elfe s'empresse d'allumer les quelques bougies de la pièce. « Ma maîtresse arrive. » La langue de Bellatrix claque dans sa bouche, désapprouve la prise de parole. Dédaigneuse, elle se poste devant un large meuble où trône quelques photos de famille. Sa baguette s'entortille autour d'une mèche de cheveux. Elle rêve Bellatrix, observant une image de sa sœur portant un Draco minuscule, l'air fatiguée mais étrangement heureuse.

Un bruissement derrière elle lui indique qu'elle n'est plus seule et son sourire s'élargit. Pourtant, elle ne détourne pas le regard de la photographie, comme hypnotisée. « Tu en a mis du temps. » qu'elle proclame, de mauvaise humeur. Fatiguée par cette nuit qui n'en fini pas.

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Sourire carnassier, loin d'être sincère. Elle caresse du bout des doigts le visage de sa sœur, s'attarde vaguement sur le poupon entre ses bras. Un monde presque parfait. Bellatrix fini par se détourner pour faire face à sa sœur, la juger de son regard sombre, ses yeux la détaillant. Belle en toutes circonstances. Un trait de famille. A croire que Narcissa non plus ne trouvait pas le sommeil. Leur ressemblance de caractère n'est pas frappante et pourtant elle est là, glissant sous la peau, flottant dans leurs veines. Éclaboussure dégueulasse. Elle a envie de rire Bella. S'esclaffer à gorge déployée, aller trouver Lucius et lui hurler aux oreilles. Voilà qui serait amusant, rendrait cette nuit intéressante. Tout pour ne pas penser. Tout pour lui faire oublier. « Il s'en remettra. » sifflement agacé, ses yeux roulent dans leurs orbites. Lucius trouvait toujours quelque chose à dire. Pièce rapportée qu'elle supportait à peine. Sentiment réciproque. Pourtant, sa sœur n'aurait pu faire meilleur mariage. Elle remercie le ciel de l'avoir fait naître en première, de lui avoir offert la primeur du choix. Elle n'aurait pas supporté une union avec Lucius Malfoy. Plutôt mourir.

« Je m'ennuie ! » qu'elle geint, gamine aux traits tirés. Elle s'affale lourdement dans un fauteuil, soufflant comme un enfant qui cherche à attirer l'attention. Rien qu'une gamine. Âme en peine, à la dérive. Elle est perdue Bellatrix. Personne à qui l'avouer, personne pour voir, lire entre les lignes. La blessure dégueulant de sang, plaie béante qui la laisse à moitié morte sur le sol. Une coquille vide. « J'ai froid. » qu'elle accepte de confesser à demi mot, murmure honteux. « J'ai tout le temps froid dans ce foutu manoir. » Pas ici. La demeure des Malfoy elle s'en fiche éperdument, n'y vient que pour les repas de Narcissa, sa présence rassurante, ses conversations à cœurs ouverts. Mais le manoir Lestrange la laisse tremblante. Elle suffoque, prise de violentes envies de hurler, tout détruire. Brûler chaque photographies qui trônent fièrement dans les pièces communes. Déchirer les draps froids, mettre le feu, lentement, à chacun de ses costumes, éliminer son odeur.

« Qu'est-ce que vous faites pour passer le temps ? » Interrogation innocente et sincère. Elle sait bien que sa sœur en avait assez de cette vie. Assez de n'être qu'une ombre, d'attendre le retour de Lucius. Narcissa avait toujours aspiré à plus. Etre supérieur dont l'intelligence ne saurait être remise en doute. Qu'importe ce qu'on disait des sœurs Black. Narcissa possédait à elle seule tout le potentiel de leur génération rongée. Alors Bella comprenait. Même si elle continuait d'observer cette étrange danse d'un œil noir, pas certaine qu'il en sortirait quelque chose de bon. « Je m'ennuie tellement Cissy ! » Debout en un battement de cils, Bellatrix arpente la pièce de son pas lent et traînant. Elle laisse ses doigts caresser les murs, les quelques objets trônant sur les étagères impeccables. Rien pour combler le vide béant qui la transperce. Rien pour venir illuminer son humeur triste et morbide. Encore une nuit en enfer.

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Elle tourne en rond Bellatrix. Lionne en cage. La rage au ventre, les paupières alourdies par la fatigue, des nuits sans dormir. Bien loin de la femme qui impose le respect d'un simple regard. Loin de celle qui envoûte d'un sourire carnassier, la folie transpirant dans chacun de ses mouvements. Avec Narcissa elle acceptait de baisser sa garde, d'être la sœur, tout simplement. Rien de plus. Bouffée d'oxygène qu'elle acceptait avec réticence, toujours l’œil derrière son épaule, en quête d'une quelconque trahison, d'un moment de faiblesse. Mais Narcissa lui ressemblait plus qu'elle ne saurait le dire. Impossible de le voir à l’œil nu. Bellatrix sait et c'est bien tout ce qu'il compte. Entre secrets et non-dits, les sœurs Black étaient devenues, avec le temps, inséparables. Entités liées par les mêmes douleurs, les mêmes craintes.

Elle s'arrête brusquement, la main en suspens, les doigts tendus sur un objet d'une banalité déconcertante. Rien d'extraordinaire. Elle darde ses prunelles sombre sur sa cadette qui l'ignore superbement, gagnant du temps en préparant un breuvage qui devrait calmer ses nerfs. En théorie. Elle grogne Bellatrix, visiblement peu satisfaite de cette réponse. Malgré tout, elle consent à faire un effort, s'affale à nouveau mollement dans le fauteuil face au canapé, prenant une position confortable. Elle a beau avoir cet air supérieur imprimé sur le visage, la tête haute, elle se sait faible Bellatrix. Gamine qui vient demander de l'aide sans avoir l'air. Du haut de ses trente six ans, elle avoue avoir encore besoin de sa sœur, de ces moments volés qui ne leur appartiennent qu'à elles. Personne n'a besoin de savoir. Et personne ne saura jamais. « Il n'est pas rentré. » Elle arrache presque le verre des mains de Narcissa, geste violent qui trahit ses émotions, son envie de tout détruire dans l'instant. Sans attendre une réponse, elle trempe ses lèvres dans le whisky pur feu, bénédiction pour sa gorge qui se met instantanément à brûler. Douleur qu'elle accueille comme une vielle amie.

Elle soupire, las et pourtant bien réveillée. L'aveu lui laisse un goût amer dans la bouche. Révélation plus douloureuse qu'elle ne l'admet. Une faiblesse qui lui transperce le cœur. Elle aimerait mieux rentrer et tout saccager chez eux. Ne pas avoir à regarder en face cette réalité qui la dépasse, lui fait ressentir ces sentiments trop forts, destructeurs. Sa poitrine se soulève, son corps parcouru des spasmes de son rire diabolique qui se répercute sur les murs. Excès de folie, moment passager. Ridicule Bellatrix. « Je ne l'ai même pas chassé cette fois. » Un exploit. Rodolphus Lestrange n'était tout simplement pas rentré. Aucune explication. Pas un mots. Rien. Rien que le vide et des draps froids, un silence pesant. Un silence qui la laissait désespérément seule avec le sombre cours de ses pensées. Jeu dangereux. « Je n'aime pas être seule. » Confession sincère qui lui arrache une grimace et elle plonge à nouveau dans son verre, peu encline à s'attarder sur cet état de fait qui la rend un peu moins dangereuse. Trop humaine.

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Difficile de garder des secrets. Impossible de mentir face à cette sœur tant aimée, ô combien chérie. L'autre face de sa pièce. Plus calme, plus réservée. Jamais dans l'opulence et la démesure. Son contraire. C'est pourtant toujours vers Narcissa qu'elle se tourne Bellatrix. Comme un refuge, une pause. Besoin de se sentir aimé pour ce qu'elle est. Besoin de savoir qu'elle ne s'est pas complètement effacé. Il reste en elle assez de sang Black et une âme qui n'appartient qu'à leur famille. Quelque chose que Rodolphus Lestrange ne lui prendra jamais. Un constat amère qui la rassure pourtant. Une contradiction de plus. L'esprit embrumé par toutes ces craintes, ces questions sans réponses. Douce folie qui trouve son chemin, l'empoisonne un peu plus chaque jour. Il en devient la cause mortelle. Et l'aveu fait à haute voix sonne comme une trahison, un défaut. Elle n'est pas sûre d'être elle-même Bellatrix, habitée par des fantômes, des voix par milliers. Elle ose un regard vers sa cadette, croisant son regard perçant, un peu absent. Des cheveux blond presque surnaturel, une peau de porcelaine. Poupée parfaite. Elle regrette presque l'époque où elles n'étaient que des gamines avec le monde à découvrir. Souvenirs à moitié effacés, ombragés par la présence d'une troisième fillette.

En compagnie de Narcissa elle ne se sentait plus si seule. Elle en oublierait presque le poids sur ses épaules, l'angoisse du noir et le froid dans son cœur. Presque. « On ne peut compter que sur son propre sang. » qu'elle conclu, froide, réaliste. Elle lève son verre dans un salut silencieux, un triste toast porté en l'honneur de la solitude qui les a rapproché. Elles se cherchent encore les sœurs Black, pas certaines d'avoir trouvé toutes les réponses. Il demeure encore trop d'ombres, une obscurité épaisse qui entrave leurs mouvements. Bellatrix se repose peut-être trop sur cette cadette aux allures de femme faite. Presque plus adulte qu'elle. Constat déstabilisant qui lui fait détourner le regard. Elle tapote sur le cristal d'un air absent, son ongle crissant contre le verre. Et elle se demande ce que dirait la grande et terrible Druella Black si elle voyait ses filles se morfondre de la sorte. Elles qui ont fait de grands mariages, fierté ultime. « Cygnus doit se retourner dans sa tombe. » Morbide, à la limite de la bienséance, ça l'a fait pourtant rire Bellatrix.

Elle n'a aucun souvenir heureux de ses parents ensemble. Avares de sentiments et de démonstrations affectives, c'était à peine si ils se montraient doux avec leurs filles. Andromeda avait eu quelques faveurs. Avant qu'elle ne s'égare. Le souvenir lui arrache une grimace et Bellatrix se noie à nouveau dans on verre finissant finalement son contenu. « Ils se sont suffisamment aimé pour engendrer trois héritières. » Héritières d'un vaste néant. Le nom de Black finira par s'éteindre. Peut-être que le nombre de trois est justement dû à l'espoir four de faire perdurer leur lignée. Et si Druella aussi en avait eu assez ? Et si elle avait fait le même choix que ses deux filles ? Autant d'interrogations qui ne trouveront jamais de réponses. Druella gardera ses secrets. Tout comme Narcissa et Bellatrix. Un trait de caractère partageait. Plus Rosier que Black.

Ses paupières lourdes se ferment quelques secondes avant que ses yeux ne trouvent ceux de sa sœur. Elle arque un sourcil interrogateur, comme si Narcissa avait toutes les réponses. Conseillère faite. Comme toujours. Les mots tournent en boucle dans son esprit. Une évidence dont elle doutait. Peut-être qu'elle ne voulait plus de ce toujours. Peut-être qu'elle avait besoin de changement. Peut-être que le couple Lestrange avait atteint son point de non retour, qu'il était désormais trop tard. « Peut-être... » Elle s'égare Bellatrix, perdue. Elle soupire en prenant appuie sur ses mains pour se lever, évitant de justesse le déséquilibre dû à la boisson. Comme si le salon lui appartenait, elle s'autorise le droit de se servir un nouveau verre de whisky pur feu. « Aux alliances ! Merci cher père de nous avoir donné à des époux ô combien facile à satisfaire ! » Elle part d'un rire strident, triste avant de boire l'intégralité du contenu de son verre. Elle ne fait pas dans la demie mesure Bellatrix. Jamais.

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Elles forment un drôle de duo. La blonde et la brune. La lumière et les ténèbres. Dualité étrange qui se complète, se comprends. Paire improbable sur qui personne n'aurait parié. Aussi différente que les astres du jour et de la nuit. Deux étoiles distantes qui ont appris à se rapprocher, s'apprivoisent encore. Et malgré les éclats de folie de Bellatrix, malgré son regard dur et ses mots acerbes, Narcissa demeure à ses côtés. Fleur immaculée qui ne romps pas sous les assauts violent de la vie. Un havre de paix, une tour solide contre laquelle s'appuyer. Elle baisse les armes Bellatrix, juste assez pour laisser voir les craquelures sur sa peau, les fêlures de son âme. Masque de composition qu'elle s'empresse de plaquer de nouveau sur son visage. Bien incapable d'accepter ses propres faiblesses, de regarder en face l'immonde vérité. Ce n'est pas un hasard si les miroirs ont la fâcheuse tendance de se briser. Certaines nuits sont plus difficiles que d'autres. Et Narcissa lui renvoie en pleine figure ses propres démons. Ça lui arrache une grimace douloureuse. Pourtant, si elle avait voulu oublier, ne pas afficher sa vulnérabilité, ses erreurs et autres défauts, elle se serait tourné vers quelqu'un d'autre.

Un frisson remonte jusqu'à son cou, lui hérissant les quelques cheveux collés à sa nuque. L'idée d'être mariée à un autre homme la révulse. Elle n'ose imaginer. « Des faibles ! » qu'elle commente, tournant à nouveau en rond dans la pièce, incapable de tenir en place. « Ca aurait été pire. Tu aurais supporté, toi, d'être mariée à quelqu'un d'aussi insignifiant ? Quelqu'un qui n'a aucune idée de comment gérer la Black qui sommeille au fond de toi ? » Le voilà le plus grand défi. Savoir adoucir l'animal sauvage, l'entretenir. Et elle comprends où veut en venir Narcissa. Douce Narcissa à l'intelligence supérieur, bien meilleure que ses sœurs. Toujours une longueur d'avance. Bellatrix a toujours su qu'il n'y avait que très peu de choix pour elle. Trop peu d'hommes qui la verrait clairement, ne craindrait pas sa folie. Elle ne peut que féliciter le choix de son père. Et le questionner. Se demander si le second n'aurait pas été meilleur. S'interroger sur cet autre vers qui elle aurait pu se tourner ce soir. Cet autre qui lui apporte autant de réconfort que Narcissa. « Bien sûr, tu avais d'autres choix. Mais Lucius a su cueillir la fleur au creux de ton cœur. » L'air dégoûté, elle observe leur photo de mariage, portant son verre à ses lèvres. Elle se détourne finalement, expirant longuement et bruyamment. Visiblement agacée. Elle continue de tournoyer autour de la pièce, comme une lionne en cage. Animal féroce qui livre un combat interne. « Moi, il n'y avait qu'un seul concurrent que j'aurai accepté. » Si il n'avait pas jeté son dévolu sur d'autres. Si la situation n'avait pas été aussi compliqué. « Rabastan aurait été différent. » qu'elle lâche finalement, à bout de souffle.

Aveu piquant, dévorant. Elle abandonne son masque Bellatrix, prend tous les risques. Avide de sincérité, de connaître les pensées de celle qui lui fait face. Elle ose un regard vers sa sœur, demi sourire sur les lèvres. Si sûre que son union avec le cadet Lestrange aurait tout changé. Persuadée qu'elle ne se trouverait pas ici ce soir. Pauvre folle. Ca n'y changerait rien. On l'avait maudite, poussée dans les bras de l'aîné. Parce qu'elle aussi était la première née. Ils avaient un devoir à remplir, des obligations. Autant de principes que Bellatrix avait balayé à coup de potions et de cris. Des obligations expulsée hors de son utérus. Souvenirs douloureux qu'elle ne souhaite pas revivre.