Tout qui se chamboule alors que tu risques encore une fois ta vie, pour la bonne cause, pour ressentir cette adrénaline perdue à jamais quand tu as donné ton âme au diable, quand tu as accepté de recevoir la marque des ténèbres sur ton bras, pour eux, simplement pour eux, toi, toi qui a toujours cru à l’espoir, toi qui a toujours cru à l’unisson des âmes, à la valeur de l’unité, tous égaux dans l’adversité des combats du monde, mettant tout ton cœur à sauver les autres, à les sauver eux, eux donc l’hémoglobine n’est pas pure, eux qui ne mériteraient pas de faire partie de votre monde, comme ils le diraient. Son nom en lettres dorées sur la porte, lui dont la vie ne tient plus qu’à un fil, lui dont le nom a passé toutes les lèvres, même les siennes, le maitre, qui a jeté son dévolu sur les De Courtecourse, le fils grandissant dans les rangs, dans le ministère alors qu’il est de sang moldu. Tu ne dis rien Hecate avant que la porte ne se ferme, avant de ressentir ces battements déjà trop violents sans comprendre si cela vient de l’adrénaline de se faire prendre ou de ces yeux qui ne cessent de pénétrer ton cœur. « Monsieur De Courtecourse ? » Tu prends une grande inspiration, ne sachant pas comment il va réagir, si seulement il pouvait te croire directement, tout serait beaucoup plus facile. Tu déclines délicatement l’offre de boisson avant de reprendre, le plus vite possible, chaque seconde de plus près de lui rapproche l’heure de sa mort, de ce destin tragique que tu aimerais éviter. « Je m’appelle Hecate Bullstrode. » Bullstrode, ou le nom qui trahit directement ton allégeance, la famille étant une des grandes puissances connues, certains de tes parents travaillant également au ministère, une des seules familles à n’avoir jamais renié son inclination plus que certaines vers les forces du mal. « Je suis venue vous prévenir monsieur, vous êtes en danger, vous et votre famille. » Vos yeux qui se croisent, alors que le courant électrique passe directement, que tu ne comprends pas pourquoi tu n’arrives pas à le regarder plus de deux secondes sans rougir, alors que tu te trouves devant un simple inconnu, une simple personne de plus à sauver. « Ils arrivent, vous ne devriez pas rester ici, fuyez partez avec votre famille là où ils ne vous trouveront pas. » Ta main qui touche la sienne alors que la proximité se fait de plus en plus rare, alors que tu peux sentir son souffle chaud sur ta peau « Faites-moi confiance je vous en prie. » Avant que tout soit trop tard.

Les secondes qui deviennent des minutes alors que tout te pèse, alors que tu sais qu'ils pourraient apparaitre à n'importe quel moment, peut-être déjà chez sa famille, tu entends déjà leurs cris, eux, des innocents qui paient de l'ambition de leur fils, de l'unique aux dons exceptionnels, qui ne sont coupables que de ne pas être comme vous, de ne pas être de votre rang, eux, les autres, tes parents qui n'arrivent pas à comprendre la richesse du coeur, qui n'arrivent pas à voir les lumières qui jaillissent de leurs yeux, eux qui ont tout à vous apprendre, vous et votre étroitesse, vous et les oeillères qui bloquent votre vision alors que tout vous semble acquis, alors que vous ne savez rien, deux chocs de culture, deux vies sans aucun point commun et pourtant, là, en ce moment, la connexion se fait entre les deux fils de votre vie, s'entremêlant étrangement alors que tu aimerais que ça continue, alors que tout te semble déchirant à l'idée de tourner des talons, comme si cette fois cette vie sauvée pouvait t'aider à sauver la tienne en retour. "Je ne suis pas comme ceux de ma famille monsieur, j'ai toujours eu foi en l'égalité des âmes et même si je me retrouve bien malgré moi dans les rangs de vous-savez-qui j'essaie de faire ma part en sauvant un maximum de personnes qui comme vous sont injustement mis sur la touche sous prétexte que votre sang est moins pur que le notre." Ta main qui ne le lâche pas, tu ne peux pas, tu ne dois pas, aucune proximité, aucune mise en danger et pourtant tu ne sais pas lâcher le regard, une bullstrode, un moldu, tu ne peux pas, l'anneau a ton doigt t'empêchant de faire le moindre pas. Tu t'éloignes déjà un peu, restant neutre, tu n'as pas le choix, pour toi, pour lui, vous qui ne vous verrez plus, plus jamais après cette unique entrevue, une vie de plus, une âme de plus, rien de plus. "Quelques heures, pas plus, si vous avez de la chance, ils iront d'abord attaquer votre famille, ils sont plus vulnérables, ils n'ont aucune chance si vous n'allez pas les cacher, partez une bonne semaine, le temps qu'ils vous oublient, qu'ils ne reviennent pas à Londres." tu le regardes durement, un instant. "Vous devez arrêter de vous exposer monsieur, ce n'est pas prudent en ces temps noirs de vous mettre en avant au ministère en étant un né-moldu. Vous vous mettez en danger inutilement." Tu regardes vers la porte, la baguette déjà prête si besoin. "Plus de la moitié du personnel est de son côté, vous ne pouvez plus faire confiance à personne ici."

Tout qui se met en suspension alors que les mots délient les coeurs, alors que tout semble enfin se mettre en place, alors qu'il semble enfin comprendre, comprendre que tu n'es pas là pour lui faire du mal. "Je veux bien le croire monsieur et c'est tout à votre honneur mais revoyez le sens de vos priorités, la famille est bien plus importante que l'ascension et la gloire. Votre travail au ministère ne vous servira plus à rien dans la tombe." Tu es dure, sûrement, les mots qui blessent, la vérité qui fuse alors que tout semble retomber, quand il accepte enfin, quand il comprend que tout n'est que question de temps, que la vie ne tient qu'à un fil et que les maures se sont penchées sur lui, attendant, amusées, jouer avec les lames du ciseaux, prête à trancher le fil, jeune, de ce garçon trop ambitieux, coupable d'avoir voulu avoir une vie normale dans un monde de fou où tout déraille, comme toi, avide de liberté, sans pouvoir l'acquérir, à jamais liée, à cet anneau, à ce mariage qui approche de jour en jour, quelques mois, pas plus, plus que quelques mois pour tenter ta chance, pour t'enfuir mais à quoi bon, à quoi bon lutter, rien ne te retient, finalement la facilité se révèle attirante quand la vie, quand la famille est remise en jeu. "Je ne me suis présentée à personne, je ne le fais jamais, je risque ma vie tout autant que vous dans ce combat mais les vies sauvées en valent la peine vous savez." Tu te diriges vers la cheminée, le regardant une dernière fois, la douceur qui prend place, le sourire doux, tendre, un instant, un instant ou tu te dis que tu aimerais bien le revoir. "J'espère que tout ira pour vous monsieur, peut-être qu'un jour nos chemins se recroiseront dans d'autres circonstances." Les flammes qui laissent place à la noirceur, alors que son visage se fait flou, alors que tu espères qu'il t'écoutera, que ce vide qu'il a laissé dans ton coeur ne sera pas vain, qu'il vivra, qu'un jour il pourra lui aussi faire la différence en sauvant le monde comme tu l'as sauvé lui.