☽☽ REVERENCESMais avant de m'endormir contre vous permettez moi d'incliner la tête et le haut de mon corps, d'ouvrir mes mains et de vous rendre hommage. Les faisceaux de lumière, emplis de chaleur, qui caressent ta peau soleil, alors que les draps s'enroulent, alors que les fenêtres s'ouvrent, que ton âme se réveille, alors que chaque respiration est une bénédiction. Le ciel est bleu, les nuages se font silence, rien, rien qui laisse présager que l'horreur était au pas de votre porte, encore hier, encore avant, alors que les gens passent et repassent sur les dalles encore ocres, alors que les cytoplasmes n'ont pas encore trouvé leur chemin vers un ailleurs, loin de cette terre
abiotique, ou les hurlements deviennent hymnes, ou les horreurs ne sont que normalité. Son visage te hante, ses cheveux d'or, son sourire doux, tout ces rêves, tout ce qu'elle a abandonné, ses yeux
adamantins se fermant pour toujours. Tu danses devant les moires sans qu'elles ne te remarques, la
senescence qui te frôle à peine, alors que la vie t'accueille, alors que le bonheur, avant
barguignant, devient ami, te touchant, t'épousant, t'offrant le monde, t'offrant une douce
déprécation, alors que les songes, alors que les murmures te laissent enfin, alors que le silence empli la pièce. Les particules de poussière comme seules compagnes dans ce réveil des anges.
Vis Salma. Vis jusqu'à en crever. Essaie, ose, rate. Souris à l'amour. Profite du soleil. Profite de chaque seconde. La prochaine fois. La chance. Pas toujours là. Aime. Embrasse sa peau. Embrasse son coeur. Lui, lui, lié. Lié à toi, pour toujours. Je le veux. Il le veux. Tu le veux. L'anneau gage de l'amour. Avance sur le chemin. Ne te retourne pas. Plus jamais. Le bruit vient de la cuisine. Ca sent le safran, le cumin et le café, alors qu'il est là, le dos tourné, alors que la lumière se meurt dans ses cheveux d'or, alors que son souffle est une bénédiction, alors que chaque matin ou tu sais qu'il t'accueillera dans la cuisine est une chance incroyable, que cette fille ne vivra plus jamais.
"Bonjour monsieur Anstruther" que tu lui murmures au creux de l'oreille, comme un secret, comme une envie, à deux, juste à deux, alors que son nom t'appartient, alors que tu t'offres à lui, lui,
ton mari. Tes lippes qui se posent sur cette joue à peine rasée. La tasse qui te brule les mains, alors que tu te poses à ta fenêtre, les gens
billebaudant au hasard, alors que plus rien a de sens, alors que la sapience craquelée des orateurs souffle au dessus de vous, alors que tout n'est que mensonge, que les dires
facondes ne sont plus que haine et déception. les parégoriques ne faisant plus effets, les yeux s'ouvrant enfin, les mondes édulcorés laissant enfin place à la vérité, à la putain de vérité, à l'horreur du monde, et toi, toi te noyant dans cette neutralité enseignée, tu n'y a plus ta place, plus jamais. Brandis les armes, brandit la haine, brandit l'espoir, vis, vis, ose, même une heure, bats toi pour leurs âmes, bats toi pour ces gens qui n'ont rien demandé, bats toi pour toi, pour lui, pour la famille que vous allez créer un jour, dans un monde qui sera beau, parce que vous vous serez battus pour ça. Les
maupiteux enfin glorifiés, les
malandrins devenant colombes, une belle histoire, ça ne peut être qu'une belle fin, tu ne peux pas croire que tout s'effondre dans l'abysse noirâtre.
"Tout parait tellement normal ce matin, comme si il n'y avait rien eu, comme si toutes les horreurs avaient été effacées d'un simple coup de gomme." L'infâme
palinodie d'un monde qui tourne à l'envers.
"Ils font tout pour que la vie nous paraisse normal pour mieux nous détruire par la suite ..." Tu ne peux plus rester là, spectatrice de la fin d'un monde, d'un mélodrame, bouge toi, avance.